Dounia Bouzar est anthropologue et dirige le Centre de prévention contre les dérives sectaires liées à l'islam (CPDSI). Créé en février, il a pour mission d'écouter et d'accompagner les familles des adolescents tentés par le jihad ou déjà partis en Syrie. Sa naissance fait suite à un rapport sur la «déradicalisation» commandé au préfet Pierre N'Gahane par Jean-Marc Ayrault lors de son arrivée à Matignon. Le CPDSI s'inscrit dans la lignée de l'un des ouvrages de Dounia Bouzar, Désamorcer l'islam radical (1), dans lequel la chercheuse pointait la nécessité pour la France de se doter d'une structure de prévention. En octobre, elle sortira un nouveau livre, Ils cherchent le paradis, ils ont trouvé l'enfer (2), nourri par les témoignages qu'elle a recueillis depuis plusieurs mois.
Quel est le profil des aspirants au jihad ?
Je ne peux parler que pour un panel de 120 familles, celles qui ont fait la démarche de contacter le CPDSI. Dans cet échantillon, il y a 70% de familles athées et 80% qui n’ont aucun lien récent avec l’immigration. Les candidats au départ sont bien plus souvent des filles ou fils de prof, de fonctionnaire, d’avocat, que des jeunes issus des quartiers populaires. Toutefois, le phénomène existe, évidemment. Le quantifier est beaucoup plus difficile car il y a fort à parier que pour des raisons de défiance envers les institutions et l’Etat, les familles plus modestes ne nous appellent pas.
Que sait-on exactement des méthodes d’embrigadement sur Internet ?
Les services de renseignement disposent désormais d’un travail de surveillance long de plusie