Au petit matin du 30 septembre, les habitants de Premià de Dalt, une bourgade au nord de Barcelone, ont découvert le buste en bronze de Jordi Pujol maculé de peinture blanche, la face contre la pelouse, au beau milieu du jardin public. L'homme fut le président de la generalitat de Catalogne (l'exécutif régional) durant vingt-trois ans, de 1980 jusqu'à sa retraite politique, en 2003. Réélu six fois, il est le père de la «nation catalane».
La destruction de sa statue est l'œuvre de «vandales», a assuré la police, précisant que les responsables s'y sont employés nuitamment, «à coups de pioche». Force est de constater que lesdits vandales ont un sens aigu des symboles : c'est à Premià de Dalt que se trouve la maison des grands-parents maternels de Pujol, une demeure qui fut son refuge pendant les tumultueuses années du franquisme et qu'il chérit toujours. Toutes proportions gardées, le déboulonnage évoque celui de la statue de Staline à Gori, sa ville natale de Géorgie, en 2010. Toutefois, dans le cas catalan, l'intéressé est toujours vivant.
L’heure de l’opprobre après un demi-siècle de gloire
A 84 ans, Jordi Pujol tiendrait même plutôt bien son âge s’il ne subissait un autre genre de déchéance, morale. Du nord au sud de la Catalogne, des municipalités parlent de débaptiser les rues ou places qui portent son nom ; d’autres prévoient de lui retirer la dénomination honorifique de «fils prodigue» ; et déjà, en août, il a été obligé de rendre la médaille d’or que la ville de Barcelone lui avait décernée en 19