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Libération
Interview

«Le débat russe, un terrain glissant»

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Tatiana Kastoueva-Jean, chercheuse à l’Ifri, pointe la «polarisation» des positions en France :
publié le 24 octobre 2014 à 20h26

Chercheuse à l’Institut français des relations internationales (Ifri), Tatiana Kastoueva-Jean cherche à rester neutre dans les joutes françaises entre «poutiniens» et «antipoutiniens».

Pourquoi Poutine séduit-il autant en France ?

Il passe pour un leader fort, capable de tenir tête aux Etats-Unis pour défendre ce qu’il estime être les intérêts nationaux. Ce type de leader trouvera toujours des adeptes en Europe. Par ailleurs, l’histoire pèse lourd dans la relation franco-russe, jouant un rôle trompeur. Des deux côtés, on cite Catherine la Grande, l’escadron de chasse Normandie-Niemen, Charles de Gaulle… Côté russe, surtout, on pioche dans l’histoire comme dans une boîte à outils pour faire croire que les deux pays ont toujours été du même côté, en omettant de mentionner la guerre de Crimée ou la guerre de 1812 sous Napoléon. On s’accroche à ces grands noms et périodes glorieuses pour ne pas parler des choses qui fâchent dans l’actualité. Ce qui est frappant, en France, c’est la très forte polarisation du débat sur la Russie. D’entrée, les gens sont classés en prorusses et antirusses, ou pro-Poutine et anti-Poutine. L’idéologie définit les discours : quand on voit la liste d’intervenants à un forum franco-russe, on a un avant-goût de ce qui sera dit. Cela appauvrit terriblement le débat intellectuel.

Qu’est-ce qui explique cette polarisation ?

La Russie a déçu, elle n'a pas évolué comme on s'y attendait. Et la France a déçu la Russie, notamment en bombardant la Yougoslavie dans les années 90. Par ailleurs, ayant du mal à faire avancer le dialogue avec l'UE, les Russ