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Libération
Interview

«Le régime a tout fait pour empêcher toute vie normale dans les zones tenues par les insurgés»

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Fabrice Balanche, spécialiste de la géographie politique de la Syrie, analyse la tactique payante de Bachar al-Assad :
publié le 24 novembre 2014 à 19h46

A l’automne 2012, la fin du régime de Bachar al-Assad n’avait jamais semblé aussi proche. La rébellion avançait dans les faubourgs de Damas, progressait à Alep, contrôlait la longue frontière turque, s’imposait dans l’Est, parvenait à tenir certains quartiers de Homs, longtemps le cœur battant de la révolution. A l’exception d’un seul, tous les postes-frontières avec la Turquie, la Jordanie et l’Irak étaient tombés entre les mains des insurgés. En Israël, où l’on suit à la loupe les événements syriens, l’armée et les services secrets étaient persuadés de l’imminence de la chute du dictateur. Dans les chancelleries occidentales, l’analyse était la même. Deux ans plus tard, le constat est radicalement différent. Non seulement Al-Assad n’a pas perdu la partie mais, ayant mené une contre-insurrection efficace contre une opposition minée par ses divisions et la montée en puissance de l’Etat islamique (EI), il apparaît aujourd’hui en position de force. Spécialiste de la géographie politique de la Syrie, directeur du Groupe de recherches et d’études sur la Méditerranée et le Moyen-Orient, Fabrice Balanche explique les raisons des succès de la stratégie du président syrien.

Pourquoi la grande majorité des experts se sont-ils trompés sur l’imminence de la chute du régime ?

Une explication de cette interprétation erronée du déroulement du conflit réside dans l'utilisation d'outils de sciences humaines, politiques et sociales inadaptés à une situation de guerre et parce que le régime d'Al-Assad n'est pas un régime «normal». La crise syrienne ayant versé dans la violence génér