Ex-responsable de l’Afrique de l’Ouest au Quai d’Orsay, Laurent Bigot a été brutalement évincé en février 2013 après avoir stigmatisé une diplomatie de faux-semblant au Mali et évoqué la chute programmée de Blaise Compaoré, alors président du Burkina Faso. Il s’exprime ici pour la première fois depuis son limogeage.
Qu’est ce qui a précipité la chute de Compaoré que vous évoquiez déjà en 2012 ?
Son maintien au pouvoir durant vingt-sept ans, mais aussi le fait que tout le pouvoir à Ouagadougou était organisé pour l’enrichissement d’un clan et non pas au bénéfice de la population, avec à la clé une corruption galopante qui a gangrené l’ensemble de l’Etat. C’est une loi universelle : un jour ou l’autre, un tel pouvoir finit par tomber comme un fruit pourri. On l’a vu en Tunisie en 2011 et cela peut très bien arriver ailleurs sur le continent. Ce qui était surtout frappant, c’était de voir que 90% des manifestants étaient des jeunes. Cela devrait alerter tous les dirigeants africains : ils ont des populations très jeunes, celles qui font des révolutions.
Distinguez-vous d’autres Burkina Faso ?
Le fait est qu'en Afrique de l'Ouest, la gouvernance est catastrophique dans plusieurs pays : notamment au Togo [avec la dynastie Gnassingbé au pouvoir depuis quarante-sept ans], mais aussi en Mauritanie. Selon une ONG américaine, l'évasion fiscale au Togo atteint 17 milliards de dollars depuis 2005. Soit quatre fois le PIB du pays. Mais qui s'en inquiète ?
Est-on à l’orée d’un printemps africain ?
Le Burkina peut incontestablement susciter une onde de choc dans la région, où certains pays présentent les mêmes structures démographiques : une