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Libération
Reportage

Stérilisations de masse : l’Inde mutilée

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Décès, absence d’information sur la contra-ception, désastre sanitaire : les campagnes de ligature des trompes menées dans les villages sont décriées.
Des femmes qui ont subi une stérilisation chirurgicale à l'hôpital de Bilaspur, en Inde. Sur les 83 opérées, au moins 14 sont décédées. (Photo Anindito Mukherjee. Reuters)
publié le 27 novembre 2014 à 18h36

Elles arrivent par petits groupes colorés, leurs tuniques et voiles composant une palette de violet, jaune, ocre et bleu. Mais leurs histoires, elles, semblent monochromes. Elles racontent le destin commun de huit femmes jeunes, pauvres et peu éduquées, forcées à se stériliser par manque d’informations sur d’autres méthodes de contraception.

Mamgita a 30 ans et n'a jamais pris de contraceptif. Cette jolie femme d'Abdulpur, village de 5 000 âmes situé à 150 kilomètres à l'est de New Delhi, appartient comme les autres à la caste des intouchables. Elle a déjà entendu parler de pilules ou de stérilets, mais personne ne lui a jamais expliqué comment elle pourrait les utiliser. «On m'a dit que les Copper-T font beaucoup saigner», dit-elle à propos du modèle de stérilet le plus connu en Inde, appelé ainsi car il est en cuivre et en forme de T.

Sa voisine sur la natte, Sangita, qui a été à l'école jusqu'à l'âge de 10 ans, est la seule à avoir déjà utilisé un contraceptif. Elle a pris la pilule pendant quelques mois, «sur les conseils d'un ami de mon mari», mais a cessé après avoir souffert de vertiges et d'éruptions cutanées. La seule information sur la contraception que ces villageoises ont reçue vient de l'auxiliaire de santé de leur quartier. «Après le deuxième enfant, elle nous rend régulièrement visite pour nous parler de la stérilisation», témoigne Sangita. Elles sont grandement incitées à suivre ses conseils : non seulement l'opération e