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Libération
Reportage

Au Mexique, sur les collines jonchées de cadavres

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Fin novembre, une cinquantaine de personnes sans nouvelles de leurs proches depuis parfois des années sont parties explorer des charniers repérés dans les environs d’Iguala. «Libération» a suivi cet étrange cortège qui défie les autorités.
Une photo d'Alexander Mora Venancio, dans la maison de son père à El Pericon, samedi. L'adolescent faisait partie des 43 étudiants disparus. Des restes de son corps ont été retrouvés et identifiés. (© Jorge Lopez / Reuters)
publié le 3 décembre 2014 à 17h46

«C'est une omoplate ?» demande une femme, penchée au-dessus d'un trou où gît une forme blanche. «Oui, ça en a tout l'air», lui répond un homme. Ils se redressent, contemplent ces restes humains, l'air consterné mais pas surpris, puis rebouchent le trou et plantent un petit drapeau rouge sur le monticule ainsi formé. C'est la cinquième fosse clandestine que découvrent ce matin-là des habitants d'Iguala, ville de l'Etat du Guerrero rendue mondialement célèbre, le 26 septembre, par la disparition de 43 étudiants.

Deux mois plus tard, en ce dimanche 23 novembre, une cinquantaine de personnes remuent la terre sous un soleil de plomb, au lieu-dit La Laguna, un dense maquis qui jouxte les derniers quartiers habités, dans l'ouest de la ville. Tous recherchent des proches disparus non pas le 26 septembre, mais il y a six mois, un an, deux ans. Jorge Popoca, un petit homme vigoureux, a perdu la trace de sa femme et de ses trois enfants en bas âge l'été dernier. «Nous savons que les collines sont parsemées de cadavres, s'exclame-t-il, les voisins nous l'ont dit !» Ils sont arrivés à 11 heures, longue caravane de véhicules remontant la piste rocailleuse sur le flanc du vallon de Cerro Gordo. Guidés par un agriculteur du coin, ils ont pénétré dans les broussailles, armés de piques, de pelles et de machettes, et ont parcouru 20 mè