«Vous voulez que l'histoire se répète ? A quoi jouez-vous ?» Dans la mairie de la ville d'Iguala, un groupe d'habitants admoneste les responsables politiques assis en rang face à eux. Le représentant du gouverneur de l'Etat du Guerrero (centre) vient de leur confirmer le retour, à une date indéfinie, des policiers municipaux. Une clameur outrée parcourt l'assemblée. Une cinquantaine de personnes, la plupart ayant un proche disparu, sont venues ce jour-là glaner une hypothétique bonne nouvelle : elles espéraient que la police d'Iguala, impliquée dans la disparition de 43 étudiants le 26 septembre, soit définitivement dissoute.
Des années durant, les forces de sécurité locales ont agi pour le compte du cartel des Guerreros Unidos («guerriers unis»), sous la houlette du maire José Luis Abarca, aujourd'hui sous les verrous dans le cadre de l'enquête sur les étudiants. Quarante policiers municipaux ont été arrêtés et 300 autres envoyés dans une caserne militaire de Tlaxcala, à des centaines de kilomètres du Guerrero, pour un stage de redressement officiellement qualifié de «formation». Plusieurs familles de victimes les soupçonnent d'avoir participé à des disparitions, le spectre de leur retour fait donc craindre de nouvelles exactions ou des représailles.
«Féodalisation». Un commerçant dont l'épicerie installée face au commissariat désert périclite irrémédiablement ne feint pas d'ignorer le profil de ses anciens clients :