Eric Garner est décédé dans des conditions abominables à New York, comme Michael Brown à Ferguson. Tamir Rice est mort, lui aussi. Le 22 novembre, Tamir est mort seul aux abords d’un kiosque dans un jardin public aux Etats-Unis, tué par deux policiers alors qu’il s’amusait à viser des passants avec un faux pistolet. Un gamin de 12 ans comme les autres en somme, pour qui le jeu a mal tourné.
Les images de la vidéosurveillance montrent un jeune Noir qui, de toute évidence, s’ennuie. Alors, il joue. C’est de son âge. Et du nôtre aussi, tant nous ressentons la nécessité de mettre entre parenthèses le principe de réalité et son cortège d’obligations et de limites. Toujours tenir son rôle, ne jamais oublier les règles de la vie commune et les obligations de la vie privée au risque d’être montré du doigt ou mis sur la touche. La vie d’adulte est une tension qui appelle son relâchement. Difficile de tenir sans détente. Le jeu est aussi exutoire, catharsis de premier ordre. «On se lâche», dit-on, c’est dire qu’on expulse ce que la vie comprime au quotidien. La distraction transforme, laisse tout présager, les victoires comme les défaites, mais rien de grave à l’arrivée : rien qu’un jeu. A Cleveland, Tamir est dans son monde. Il joue au gangster ou au policier, allez savoir. Son arme est factice, tout le monde le voit, y compris le témoin qui croit bon d’appeler la police. Avec ses normes et sa logique propre, le jeu est un pied de nez à la vie. L’homme y invente ses propres lois, comm