Pourquoi les Etats-Unis changent-ils de stratégie vis-à-vis de Cuba ? Nous avons demandé à Thomas Snégaroff, historien des Etats-Unis à l'Institut des relations internationales et stratégiques (Iris), de nous l'expliquer. Il est notamment l'auteur de Bill et Hillary Clinton : le Mariage de l'amour et du pouvoir (aux éditions Tallandier).
En rétablissant les relations avec Cuba, les Etats-Unis signifient-ils qu’ils en ont bel et bien fini avec la guerre froide ?
La Corée du Nord mise à part, la guerre froide n’existe plus aujourd’hui que dans la rhétorique et dans l’usage politique qui en est fait, par les Russes notamment. Pour les Américains, Cuba dépasse la guerre froide. Quand, en 1898, les Américains ont libéré l’île de la puissance hispanique, ils l’ont fait au nom de la doctrine Monroe et du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. En vérité, l’objectif était bien sûr de mettre la main sur Cuba. D’ailleurs, les Cubains ne sont pas restés indépendants longtemps. Dès 1901, Washington votait l’amendement Platt, qui entérinait le joug des Américains sur les Cubains. Reste que dans le roman national outre-Atlantique, l’idée s’est imposée que les Américains ont libéré les opprimés cubains de la puissance colonialiste européenne.
Le deuxième moment du mythe américano-cubain s’est noué quand Fidel Castro s’est jeté dans les bras de l’URSS. Les Etats-Unis ont alors à nouveau joué le rôle du sauveur qui veut promouvoir la démocratie à Cuba, c’est-à-dire un régime sans Castro. On est encore dans le mensonge, puisqu’au même moment les Américains font tomber Salvador Allende au Chili et financent