Le Corinthia est l'un des hôtels les plus luxueux de la capitale libyenne, Tripoli. C'est là qu'avaient l’habitude de descendre et travailler hommes d'affaires et diplomates, dont le représentant spécial de l’ONU en Libye, Bernardino León. A la mi-journée, l'hôtel a été le théâtre d’un assaut de plusieurs heures revendiqué via Twitter par des combattants de l’Etat islamique en Libye. Au total neuf personnes ont été tuées dans l’attaque, dont cinq étrangers.
L’assaut a commencé le matin par l’explosion d’une voiture piégée devant l’établissement. On voit sur cette vidéo l’explosion de loin :
Aussitôt après, trois hommes armés ont pénétré dans l'hôtel. Ils sont immédiatement pourchassés par les forces de sécurité. L'assaut s'est achevé en milieu d'après-midi avec la mort des trois assaillants qui ont activé les ceintures explosives qu'ils transportaient, alors qu'ils étaient «pourchassés et encerclés» au 24e étage, selon Issam Al-Naass, porte-parole des opérations de sécurité à Tripoli.
Outre les cinq étrangers, une sixième personne «prise en otage» par les assaillants et dont la nationalité n’est pas connue a péri lorsque les hommes armés se sont fait exploser. Trois membres de sécurité, vraisemblablement affectés à la garde de l’établissement, sont également morts, un dans la voiture piégée et deux sous les tirs des assaillants.
Selon le témoignage d'un employé, recueilli par l'agence AP et repris par le New York Times, des clients de l'hôtel, dont des ressortissants britanniques, italiens et turcs, se sont enfuits par l'arrière du bâtiment lorsque l'attaque a commencé.
La journaliste Rana Jawad, correspondante en Libye de la BBC, a indiqué sur son compte Twitter que l'hôtel avait reçu, quelques jours auparavant, une menace les invitant à «évacuer le bâtiment» dixit un employé de sécurité. Présent sur place également, le journaliste freelance Mathieu Galtier, correspondant de Libération à Tripoli, a fait état de trois tireurs retranchés au 16e étage de l'hôtel Corinthia, de source sécuritaire.
Went to #corinthia. Police refused to talk. Accdg to security forces source: 3 gunmen in 16th floor, maybe hostages involved #tripoli #libya
— Mathieu Galtier (@mathieu_galtier) January 27, 2015
Les journalistes ont été tenus à l’écart de l’hôtel, rapporte la journaliste indépendante Maryline Dumas.
Des dizaines de voitures de police et brigade devant l'hotel #corinthia #tripoli #lIbye. impossible de prendre des photos.
— Maryline Dumas (@Maryline_Dumas) January 27, 2015
Plusieurs attaques de moindre ampleur ont été revendiquées ces derniers temps en Libye par des comptes Twitter proches de l’Etat islamique, qui semble vouloir démontrer sa capacité de frappe dans la région. D’après le compte Twitter qui a revendiqué l’attaque, l’assaut a été mené en représailles à la mort d’Abu Anas al-Liby, de son vrai nom Nazih Abdul-Hamed al-Ruqai, jihadiste libyen suspecté d’avoir participé aux attentats d'Al-Qaeda contre les ambassades américaines au Kenya et en Tanzanie en 1998. Il est mort le 2 janvier dans un hôpital new-yorkais, de complications à la suite d’une opération du foie, avant que ne s’ouvre son procès.
Autre hypothèse, la cible de l’attentat pourrait être le chef du gouvernement auto-proclamé en Libye, Omar al-Hassi, qui se trouvait à l’intérieur de l’hôtel au moment de l’assaut. Il a cependant été évacué sain et sauf, selon le porte-parole de la sécurité.
La capitale libyenne est contrôlée par Fajr Libya, une puissante coalition de milices, notamment islamistes, qui a installé un gouvernement parallèle à Tripoli après en avoir chassé le gouvernement reconnu par la communauté internationale.
Dans une première réaction à l'attaque, la représentante de la diplomatie européenne Federica Mogherini a condamné «un acte de terrorisme répréhensible qui porte un coup aux efforts destinés à rétablir la paix et la stabilité dans le pays», en allusion aux négociations en cours à Genève.