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Libération

Le dessinateur Lars Vilks à nouveau pris pour cible

Ce Suédois controversé est menacé depuis une caricature de Mahomet en chien.
publié le 15 février 2015 à 20h06

Lars Vilks, qui participait à la manifestation visée samedi par une attaque terroriste à Copenhague, est un type un peu étrange, au goût très prononcé pour la provocation. Ce qui fait d’ailleurs de lui un artiste très controversé dans son pays, la Suède, notamment depuis la publication en 2007, dans un journal local, d’un dessin représentant la tête du prophète Mahomet sur le corps d’un chien. La caricature avait été réalisée dans le cadre d’une expo sur le thème du chien. L’année précédente, alors que le thème portait sur le chat, un des caricaturistes présents avait représenté George Bush.

Chien. Estimant que les règles de la satire devaient s'appliquer de la même façon aux figures religieuses qu'aux leaders politiques, Vilks avait décidé de représenter le Prophète sur un corps de chien, au milieu d'un rond-point, en référence à cette nouvelle tradition suédoise consistant à placer des sculptures de canidés au centre de ces croisements. Le dessin, finalement jugé trop provocateur, avait été banni de l'expo. Lars Vilks ne s'en cache pas : son projet artistique est de repousser les barrières aussi loin que possible. Mais si c'est surtout contre l'administration suédoise qu'il a dû lutter, avec son œuvre «Nimis» - une énorme sculpture de bois, construite sans autorisation dans une réserve naturelle - ses ennemis sont désormais bien plus dangereux. Son nom figure sur la liste des cibles d'Al-Qaeda, en compagnie du caricaturiste danois Kurt Westergaard ou de Charb, assassiné le 7 janvier dans les locaux de Charlie Hebdo. Lars Vilks, qui a subi plusieurs tentatives d'assassinat, vit sous protection policière. En octobre 2009, la police américaine a arrêté une femme, Colleen LaRose (alias Jihad Jane), aux Etats-Unis. Cette dernière a été condamnée à dix ans de prison, après avoir avoué préparer un attentat contre le Suédois. Quelques mois plus tard, c'est en Irlande que des personnes sont interpellées pour le même motif. En mai 2010, deux hommes, depuis condamnés à deux et trois ans de prison, tentent de mettre le feu à sa maison dans le sud du pays. Si les tentatives d'assassinat ont été à chaque fois fermement condamnées par la Suède, le personnage dérange. Ses fréquentations surtout, qui font de lui, aux yeux de beaucoup dans son pays, un homme insaisissable.

Politiquement correct. Sa participation à une conférence organisée par l'organisation Stop Islamisation of Nations (SION) à New York, en septembre 2012, en présence de représentants de l'English Defense League, n'a pas arrangé les choses. Vilks y avait alors croisé Pamella Geller, la présidente de l'association, ainsi que Robert Spencer, écrivain américain, tous deux critiques de l'islam. Fin janvier, c'est son galeriste à Malmö qui a fait parler de lui en y organisant la première marche anti-islam Pegida en Suède. Vilks dénonce fréquemment le règne du politiquement correct et les limites de la liberté d'expression : à plusieurs occasions, des expositions de ses œuvres ont été annulées en Suède après des protestations. Le Comité Lars-Vilks, qui organisait la conférence de samedi à Copenhague, a été formé par des intellectuels danois pour le soutenir. Les membres de cette organisation, cofondée par la polémiste Helle Merete Brix et l'artiste Uwe Max Jensen, dénoncent fréquemment l'impossibilité de critiquer l'islam au Danemark et ailleurs.