Au lendemain de l’épilogue sanglant des deux attentats qui ont fait deux morts et cinq blessés à Copenhague ce week-end, les Danois, encore sous le choc, essaient de comprendre ce qui a bien pu se passer. La police a confirmé que l’homme abattu dimanche au petit matin dans le quartier populaire de Norrebro était bien l’auteur des fusillades contre le centre culturel de Krudttonden et la grande synagogue de la capitale.
Selon les médias, il s’agit d’Omar Abdel Hamid el-Hussein, 22 ans, né au Danemark de parents palestiniens qui ont trouvé refuge dans le royaume scandinave après un passage dans un camp de réfugiés en Jordanie. Sur une des rares photos circulant sur la Toile, le jeune homme, cheveux foncés et petite barbe au menton, en tenue de sport, est assis sur le siège avant de ce qui ressemble à un van. Un autre cliché, provenant d’une caméra de surveillance installée dans le métro et daté du 22 novembre 2013, le montre engoncé dans un anorak noir, un sac de la même couleur sur le dos. La photo a été prise quelques minutes après qu’Omar el-Hussein a poignardé à plusieurs reprises un homme de 19 ans sans aucune raison apparente. Il a été arrêté deux mois plus tard.
«Élève appliqué». Condamné pour coups et blessures, il était en prison depuis janvier 2014. C'est de là qu'il a sans doute suivi les attaques contre Charlie Hebdo et l'Hyper Cacher. S'en est-il inspiré ? Les services de renseignement danois semblent le croire. Les journalistes évoquaient même dimanche soir l'éventualité d'un «copycat» : difficile de ne pas noter les ressemblances avec les attentats de Paris. Mais beaucoup d'incertitudes demeurent autour de la personnalité du tueur présumé, qui venait à peine d'être remis en liberté. L'administration pénitentiaire a révélé qu'il faisait l'objet d'une surveillance particulière en prison : «Il était un de ceux sur lesquels nous gardions un œil, et nous avions envoyé un rapport aux PET [les services de renseignement danois, ndlr]», a déclaré Michael Gjorup, chef de la sécurité au quotidien Berlingske Tidende. Si son nom «avait déclenché des clignotants», c'est qu'«il avait changé de comportement» récemment.
Ceux qui le connaissaient, pourtant, ne semblent pas comprendre. Avant d'être arrêté, le jeune homme allait au lycée à Hvidovre, un quartier du sud-ouest de Copenhague. Son proviseur, Peter Zinkernagel, interviewé par la chaîne DR, assure qu'il était «un élève doué et très appliqué, qui avait de bons résultats». Il y a quelques années encore, il pratiquait la boxe thaïe au Muay Thai, un club de la capitale fréquenté par des Danois d'origine palestinienne.
Avec son 1,88 m, il faisait preuve d'un certain talent, qui lui a valu de figurer en haut du tableau des «étoiles montantes» du club en 2010. C'est ensuite que tout aurait dérapé, selon un de ses amis, qui raconte au journal Politiken : «Il a commencé à avoir de très mauvaises fréquentations. Du jour au lendemain, il s'est mis à fumer énormément de hasch. Il a été attiré dans un piège. Je pensais qu'il était trop intelligent pour se laisser faire. Mais apparemment non. Malheureusement.» Omar el-Hussein entre en contact avec le milieu des bandes organisées dans le quartier de Norrebro. Ces dernières années, la guerre des gangs à Copenhague opposant clubs de motards et jeunes d'origine immigrée (souvent nés au Danemark) a fait plusieurs morts et des dizaines de blessés. Pour Omar el-Hussein, c'est le début d'une carrière de délinquant.
Angoisses. Le jeune homme est interpellé deux fois pour possession de cannabis, s'en sort avec un avertissement. Puis il est arrêté à plusieurs reprises pour infraction à la législation sur le port d'armes et actes de violence, jusqu'à son incarcération en janvier 2014. Au juge, il explique souffrir d'angoisses et avoir été sous l'emprise de la drogue lorsqu'il a poignardé un passager dans le métro. Il échappe de peu à une condamnation pour tentative de meurtre. S'est-il radicalisé en prison ? Avant son incarcération, déjà, il parlait constamment de la Palestine et n'hésitait pas «à dire ouvertement qu'il détestait les juifs», selon l'un de ses amis.
Lundi, deux hommes âgés de 19 et 22 ans, arrêtés la veille au cours d’une vaste opération de police à Copenhague, ont été écroués. Ils sont soupçonnés d’avoir aidé El-Hussein à préparer les attentats, notamment en lui fournissant le fusil-mitrailleur qu’il a utilisé lors des attaques. Tous deux risquent de très lourdes peines de prison.
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