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Libération
Interview

«L’instabilité pourrait contaminer d’autres régions d’Ukraine»

Guerre entre l'Ukraine et la Russiedossier
Le ministre des Affaires étrangères roumain, Bogdan Aurescu, est en visite à Paris ce lundi :
publié le 22 février 2015 à 18h56

La crise ukrainienne préoccupe toujours plus les pays voisins. Le ministre roumain des Affaires étrangères, Bogdan Aurescu, rencontre ce lundi à Paris son homologue français, Laurent Fabius.

La Roumanie partage 650 km de frontière avec l’Ukraine. Se sent-elle menacée ?

Il est crucial pour nous que l’Ukraine reste stable. Les accords de Minsk sont un pas dont nous nous réjouissons, mais il y a des difficultés dans leur mise en application. Tant que le cessez-le-feu n’est pas totalement respecté, on ne peut pas passer au retrait de l’armement lourd. Si ces étapes ne se réalisent pas, les accords de Minsk seront fragilisés et il y a la possibilité d’une nouvelle escalade. L’instabilité pourrait alors contaminer d’autres régions ukrainiennes, y compris des régions proches de la Roumanie. Il y a d’ailleurs eu des incidents pas loin de notre frontière, comme les explosions dans la région d’Odessa.

En cas d’échec des options politiques et diplomatiques, Washington et certaines capitales européennes évoquent des livraisons d’armes à l’armée ukrainienne. Qu’en pense la Roumanie ?

Nous sommes en train de veiller pour l’instant au respect des accords de Minsk, qui sont évidemment un compromis, mais ils représentent une chance pour la résolution du conflit. Nous pensons toujours qu’il faut privilégier les négociations et une solution politique. Si cela aboutit à une impasse, il y a ensuite la possibilité de nouvelles sanctions. Quant à la livraison d’armes, il y a plusieurs opinions. Certains estiment que cela ne fera qu’amplifier le conflit, d’autres disent qu’il faut aider les Ukrainiens à se défendre. Bucarest est en train de réfléchir pour voir quelle est la meilleure option. Par ailleurs, je ne pense pas que la Roumanie détienne les équipements sophistiqués dont l’armée ukrainienne a besoin. Mais il est encore trop tôt pour parler de cela.

Vous êtes en France également pour discuter de la lutte contre le terrorisme. Quelles sont vos propositions ?

Je pense qu’il faut lier les dimensions nationale et internationale de la lutte antiterroriste. Pour cela, nous avons suggéré des réunions communes des ministres européens de l’Intérieur et des Affaires étrangères. Nous proposons également de réfléchir à la création d’une cour internationale spécifique pour les crimes de terrorisme. L’idée n’est pas nouvelle. En 1934, après l’assassinat à Marseille du roi de Yougoslavie et du ministre français des Affaires étrangères Louis Barthou, l’émotion a été tellement forte qu’on a pris la décision de rédiger une convention et de créer une cour pénale permanente afin de juger les crimes de terrorisme international. Ce fut d’ailleurs un juriste roumain, Vespasian Pella, qui a rédigé le texte de la convention. Mais la Seconde Guerre mondiale a éclaté et cette institution n’a jamais vu le jour. Nous pensons que cette idée pourrait aussi s’avérer un outil efficace.