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Libération
Décryptage

Nucléaire iranien: les cinq questions qui fâchent

Les diplomates réunis à Lausanne ont finalement jusqu'à mercredi pour arracher un accord.
Avant la réunion de ce mercredi sur le nucléaire iranien, à Lausanne. (Photo Brendan Smialowski. AFP)
publié le 31 mars 2015 à 13h14

Après douze ans d’un bras de fer diplomatique sans équivalent, les 5+1 (les membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU et l’Allemagne) avaient théoriquement jusqu’à mardi soir minuit pour arracher aux mollahs iraniens un renoncement clair à la bombe atomique, en échange d’une levée des sanctions internationales. Voici les cinq points autour desquels se cristallisent les discussions à Lausanne, en Suisse.

Quelle durée pour cet accord?

C’est LA grande question. Au nom d’une France revendiquant son rôle pionnier de fermeté, Laurent Fabius assume le costume forcément caricatural du «mauvais flic». Il rappelle les mensonges passés de la République islamique sur son programme nucléaire clandestin et exige un contrôle méticuleux des installations scientifiques iraniennes pendant une durée considérée comme «humiliante» par l’Iran : un quart de siècle. Washington se contenterait très bien d’un accord sur dix ans.

Quel calendrier pour la levée des sanctions internationales?

Téhéran exige toujours leur suspension immédiate, car elles étouffent son économie. Mais les Occidentaux se méfient et veulent pouvoir les rétablir rapidement, si jamais l'Iran violait ses engagements. Ils plaident donc pour une levée graduelle. «On ne peut malheureusement pas faire confiance à la parole donnée», rappelle un diplomate européen.

Comment procéder aux nécessaires vérifications?

La communauté internationale veut ramener le nombre de centrifugeuses iraniennes à 6000, contre 19000 aujourd’hui. Ce chiffre, accompagné d’un encadrement des sources de plutonium et d’autres mesures techniques complexes, empêcherait l’Iran d’avoir la bombe pendant au moins un an. Mais encore faut-il connaître toutes les installations clandestines. A Vienne, l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) milite pour que Téhéran ratifie le protocole additionnel du TNP. Car ce texte permettrait enfin à ses inspecteurs - bien impuissants - d’aller fouiller là où il le faudrait. Ce serait même la «pierre angulaire» pour repartir sur des bases saines, dit un expert en poste à l’AIEA.

Comment faire plier l’Iran sans l’humilier?

Le Guide suprême a toujours clamé que chercher à avoir la bombe était contraire aux préceptes de l’islam. En cas d’accord, l’AIEA est donc fortement incitée à revenir bredouille de ses investigations futures dans les poubelles nucléaires de Khamenei. Or tout cela se négocie aussi méticuleusement, car l’Agence a évidemment peur d’être la grande victime collatérale d’une entente historique entre les grandes puissances et un «état tricheur». Elle soupçonne depuis 2011, l’Iran d’avoir un programme nucléaire militaire et voir sa thèse invalidée réduirait son autorité à peau de chagrin.

Comment limiter les risques de prolifération?

En cas d’accord, des sources à l’AIEA craignent aussi que les mafias présentes en Iran, une frange des redoutées pasdarans ou encore des scientifiques, fragilisés par le retournement de la situation, n’organisent un marché noir des technologies nucléaires. L’Iran est rongé par des castes concurrentes et leur pouvoir de nuisance reste difficile à cerner. Les réformateurs au pouvoir promettent de tout faire pour limiter les dégâts, mais sans vraiment convaincre.