Au terme de huit jours de négociations laborieuses, les Occidentaux ont arraché un accord provisoire, jeudi, à Lausanne. Quels sont les points positifs de cette entente, qui permettrait de réintégrer l’Iran dans la communauté internationale ?
On a évité la rupture. C'est le plus important : rien n'aurait été pire que d'acter un échec. «Et désormais, Téhéran aura désormais du mal à faire marche arrière», croit savoir un fonctionnaire international, en poste à l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), basée à Vienne, en Autriche.
Qu’en est-il de la levée des sanctions ?
La communauté internationale n’a pas cédé sur ce point, ce qui lui permettra de manier encore un peu du bâton si l’Iran ne respecte pas ses engagements. Car il ne faut pas s’attendre à un mouvement avant le conseil des gouverneurs de l’agence, qui suivra la rédaction de l’accord final, fin juin. Or il a lieu le 7 septembre prochain.
Quelle surveillance des installations ?
La souveraineté nucléaire de l’Iran devient très relative. La République islamique a donné son feu vert à des inspections sur quinze ans, voire sur vingt-cinq ans, concernant les mines d’uranium. Les sites de Fordow et d’Arak sont neutralisés. Seul le site de Natanz sera désormais autorisé à accueillir des programmes d’enrichissement d’uranium dans les dix ans qui viennent.
Enfin, pour les spécialistes, la bonne nouvelle réside surtout dans la promesse faite par Téhéran de mettre en application le protocole additionnel du Traité de non-prolifération. En clair, c’est le point précis de l’accord qui permet de rendre crédibles les vérifications qui seront faites sur place par l’AIEA et qui coupe l’herbe sous le pied des opposants à l’entente actuelle. Car ce texte autorisera les inspecteurs internationaux à aller vraiment fouiller où ils le voudront dans les prochaines années, et ce de manière inopinée.
Grâce à toutes ces mesures, la communauté internationale se croit autorisée à assurer que Téhéran se trouvera dans l’incapacité de se doter de la bombe atomique, pendant au moins un an. Mais il y a quelques points négatifs.
Quand cet accord sera-t-il mis en œuvre ?
Le plus grave : aucun calendrier contraignant de mise en application ne semble encore avoir été arrêté, ce qui promet une poursuite harassante du feuilleton diplomatique pendant encore au moins trois mois. L’Iran, dont la politique intérieure est capricieuse, pourrait continuer de faire traîner les choses, même s’il devrait logiquement s’appliquer à faire preuve de bonne volonté s’il espère une levée des sanctions à moyen terme.
Quid des activités militaires ?
Dès le départ, les capacités balistiques de l’Iran ont été exclues du paramètre des négociations. Or elles sont évidemment liées à son programme nucléaire clandestin et la République islamique va conserver toutes ses capacités militaires actuelles.
Par ailleurs, les termes de l'accord sont assez flous concernant ce qu'on appelle les «possibles dimensions militaires». Ce champ de négociations concerne les réponses que l'Iran n'a jamais données à l'agence de Vienne sur ses activités nucléaires militaires réalisées avant 2003, autrement dit les vieux dossiers. Il paraît clair que Barack Obama a renoncé à prouver la dualité du régime sur ce sujet. «On va désormais sûrement nous demander de vérifier que l'Iran n'aura pas la bombe, confirme une source à l'AIEA, mais plus, semble-t-il, de prouver qu'il a cherché à l'avoir par le passé.» La communauté internationale qui ferme les yeux sur ces «erreurs de jeunesse», c'est une manière de laisser une porte de sortie honorable au Guide suprême iranien, une vraie concession politique de la part des Américains et des Européens, pour rétablir la confiance avec la République islamique. Mais il s'agit aussi, malheureusement, d'une une sorte de «prime au tricheur» assez peu orthodoxe, au strict regard du droit international.
Enfin, le chercheur Jean-Sylvestre Mongrenier, partisan de la ligne dure sur l'Iran, déplore qu'un droit à l'enrichissement ait été reconnu aux mollahs. «Car les résolutions du Conseil de sécurité exigeaient l'arrêt des centrifugeuses, rappelle ce membre de l'Institut Thomas More. Aujourd'hui, on lui accorde le droit d'en conserver 6 000. Donc, petit à petit, les Iraniens, qui ne sont pas sur une même échelle du temps que les démocraties occidentales, obtiennent des concessions diplomatiques réelles et cruciales, tout en violant les lois internationales.» Une exception mondiale dangereuse qui se doit, selon lui, d'être soulignée.