«La première fois qu'il a tiré mes cheveux, je me rappelle m'être dit qu'il s'agissait probablement d'espièglerie, puisque la plupart des gens qui le rencontrent disent de lui qu'il est "si gentil".» De qui parle cette serveuse d'un café d'Auckland, en Nouvelle-Zélande ? Rien moins que le Premier ministre du pays, John Key, qui l'a harcelée pendant plusieurs mois en s'amusant à lui tirer les cheveux quand il venait passer du temps dans son établissement. Et qui doit maintenant s'en excuser, alors que resurgissent quelques autres de ses écarts.
Dans un long texte (en anglais) publié sur le site néo-zélandais The Daily Blog, cette femme, dont l'identité reste secrète, raconte ainsi comment, de tirage de cheveux en tirage de cheveux, le comportement de John Key, 53 ans, lui est devenu insupportable. Tentant d'abord d'exprimer par sa réaction physique l'ennui que lui inspirait ce genre de blagues, la serveuse a ensuite «commencé à éviter les interactions avec lui». Mais John Key semblait en avoir après elle spécifiquement, «donc le petit jeu a continué» : «Il s'approchait par derrière quand j'étais sur le terminal de commandes, tirait mes cheveux et prétendait ensuite que sa femme, Bronagh, l'avait fait […], et elle lui disait d'arrêter.» Et le Premier ministre d'ajouter, en disparaissant : «C'est une queue-de-cheval très alléchante.» Plus tard, il récidivera en chantonnant le thème des Dents de la mer avant de commettre son forfait.
«Caïd de cour de récré»
Que faire ? Le dénoncer devant tout le monde ? En parler à sa sécurité ? La serveuse explique son raisonnement : «Je pouvais lui dire que je n'aimais pas ça, mais il ne fallait pas que je "doive" le faire. Il se comportait comme le caïd de cour de récré qui tire les cheveux des petites filles pour obtenir une réaction, expérimentant ainsi son sentiment de pouvoir. Je me disais que même un gamin de cinq ans est capable de dire que si on tire les cheveux d'une fille, elle n'aimera pas ; je ne devrais donc pas avoir à le dire au Premier ministre.»
De fait, le problème de John Key avec les cheveux des femmes ne semble pas nouveau, ainsi que l’a souligné une internaute sur Twitter en ressortant un extrait télévisé datant de l’année dernière.
Et ce n'est en fait qu'un seul des nombreux comportements sexistes, homophobes ou racistes de cet homme de centre droit, au pouvoir depuis 2008. Quelques-uns ont été listés par le site du Guardian dans un accablant florilège. Par exemple, en 2010, John Key a dû s'excuser pour avoir suggéré qu'une tribu maorie pourrait bien «le manger au dîner». En 2012, il blaguait sur le «haut rouge homosexuel» d'un animateur de radio dont il était l'invité – ce qui lui avait valu les critiques de l'acteur britannique Ian McKellen, qui incarne Gandalf dans le Seigneur des Anneaux et qui est un militant des droits des homosexuels. A la fin de l'année dernière, il s'exhibait avec un tee-shirt sur lequel on lisait «je ne suis pas désolé d'être un homme», une référence à un discours de l'ancien leader du Parti travailliste qui se disait «désolé d'être un homme parce que les violences conjugales et sexistes sont majoritairement perpétrées par des hommes à l'encontre de femmes et d'enfants».
Dans le cas de ses tirages de cheveux à répétition, John Key a fait réagir le Conseil national des femmes néo-zélandais, qui a relevé «combien le sexisme fait partie de notre culture, à commencer par le sommet». Invité ce mercredi sur la chaîne TVNZ, John Key a présenté ses excuses à la serveuse qu'il avait harcelée, tentant de se défendre en indiquant qu'il avait agi «dans un contexte de plaisanteries».