Violence et danse à Baltimore, sur la côte Est des Etats-Unis : après une journée de manifestations qui ont éclaté peu après les funérailles d'un jeune Noir, décédé après son arrestation par la police, le gouverneur du Maryland, a déclaré l'état d'urgence «pour restaurer l'ordre» dans cette ville de 620 000 habitants située à une soixantaine de kilomètres de Washington. La maire de la ville, Stephanie Rawlings-Blake, a aussi annoncé l'instauration d'un couvre-feu mardi à partir de mardi 22 heures jusqu'à 5 heures, tous les jours pour une semaine.
Alors que les médias américains, à l'image du Baltimore Sun, le journal local, pointent dans leur majorité l'ampleur des dégradations, plusieurs tweets postés par des manifestants veulent montrer que l'ambiance qui a régné dans les rues jusque dans la nuit n'était pas tant à l'émeute qu'à la contestation joyeuse. Sur Twitter, cette vidéo d'un homme perché sur un box et diffusant du Michael Jackson à fond dans la rue a été partagée près de 2 000 fois.
Une autre vidéo montre également les efforts de certains manifestants pour éviter que la situation dégénère :
▶️ VIDEO: What they don't show you on the news. Protester trying to stop violence. #BaltimoreRiots #BaltimoreProtests pic.twitter.com/QuCdKnoABM
— Matthew Sabia (@MatthewSabia) April 28, 2015
Les violences, circonscrites dans un quartier du nord-ouest de la ville, ont fait 15 blessés parmi les policiers, dont six ont été touchés plus grièvement. Il y a eu 27 arrestations. Les manifestants «refusent de suivre nos ordres de dispersion», a expliqué la police de Baltimore sur Twitter, évoquant des individus «très agressifs et violents», munis de «bâtons, de briques, et d'autres armes». La ville a décidé de fermer toutes ses écoles mardi.
Certains manifestants ont jeté des pierres et d’autres objets en direction des forces de l’ordre munies de boucliers anti-émeute. Ils ont brûlé des voitures de police, pillé puis incendié un supermarché.
Les violences «ne représentent pas la famille Gray, ni les sept derniers jours de manifestations pacifiques, et c'est pour ça qu'on demande à tous ceux qui y participent de rentrer chez eux», a affirmé le pasteur Jamal Bryant, qui présidait quelques heures avant aux obsèques du jeune Freddie Gray. Au moment des funérailles, la police de Baltimore avait annoncé avoir reçu une «menace crédible» de gangs locaux qui auraient «noué un partenariat pour "éliminer" des policiers». Si le lien n'a pas été établi à ce stade avec les manifestations dans la ville, la police a demandé aux officiers de prendre leurs précautions.
Bavure
Freddie Gray est décédé le 19 avril des suites d'une fracture des vertèbres cervicales une semaine après son interpellation à Baltimore, qui compte plusieurs quartiers sensibles. Ce décès est le dernier d'une série de bavures policières qui ont ravivé les tensions entre la communauté noire et les forces de l'ordre.
La violence à Baltimore lundi soir contrastait avec le calme et la dignité de la cérémonie en hommage à Freddie Gray. «C'était un jour sacré dédié aux funérailles. Donc pour nous, sortir de l'inhumation et se retrouver là-dedans est absolument inexcusable», a estimé le pasteur Jamal Bryant. Quelques 3 000 personnes, famille, amis et anonymes, tous Noirs, avaient rendu dans le calme un hommage mêlé de prières et de militantisme au jeune homme, qui reposait dans un cercueil blanc ouvert, entouré de gerbes de fleurs blanches dans l'église baptiste New Shiloh.
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Le président américain Barack Obama a été informé de la situation par sa nouvelle ministre de la Justice Loretta Lynch, qui venait juste de prêter serment lundi. Le militant Jesse Jackson a dénoncé, avant la cérémonie, une «épidémie de meurtres dans le pays». «Nous sommes devenus trop violents, trop plein de haine», a-t-il dit, dénonçant la pauvreté des villes. Depuis l'annonce de la mort de Freddie Gray, des manifestations ont lieu quotidiennement à Baltimore. Celle qui a eu lieu dans la nuit de samedi à dimanche avait déjà dégénéré en violences.
Plusieurs enquêtes ont été lancées pour élucider les circonstances des blessures de Freddie Gray, sans conclusions. La police de Baltimore a toutefois convenu que le jeune homme aurait dû recevoir une assistance médicale après son arrestation. Selon une enquête approfondie du Baltimore Sun, la police de la ville a été poursuivie pour des abus, essentiellement contre des Noirs, à 317 reprises depuis 2011.