Menu
Libération
EDITORIAL

Archaïsme

publié le 29 avril 2015 à 20h16

Le président indonésien Joko Widodo, élu en 2014, porte volontiers des baskets et déclare à qui veut l’entendre sa passion pour le heavy metal dont l’Indonésie est la première scène en Asie. Il s’est fait élire en arguant de sa proximité avec les gens simples et de sa considération pour les droits de l’homme. Pourtant son pays, après avoir exécuté sept ressortissants étrangers, s’apprête à mettre à mort Serge Atlaoui, qui clame son innocence et qui serait le premier Français exécuté depuis trente-huit ans, en France ou à l’étranger. Pour écarter cette menace, on pourrait expliquer au président rocker que l’abolition de la peine de mort est un pas indispensable dans la construction d’une société démocratique, que la civilisation et ses lois proscrivent aux Etats de mettre à mort quiconque, serait-il le plus endurci des criminels, que la peine capitale ne joue aucun rôle dissuasif envers les criminels, que les pays où elle a été abolie ne sont pas plus frappés que les autres par l’insécurité et que dans le cas d’une erreur judiciaire - cela arrive -, on tue de surcroît des innocents. A cet élu hors norme qui cultive une image de modernité, on pourrait aussi faire remarquer que, sur le long terme, les nations du monde abandonnent l’une après l’autre cette pratique inhumaine, qu’elles remplacent par des peines de prison longues et incompressibles. Mais c’est sans doute inutile : seule une pression politique vigoureuse et la menace de sanctions diplomatiques et économiques pourra faire reculer ce pouvoir archaïque et sauver Serge Atlaoui.