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Libération

Airbus porte plainte contre X pour espionnage

Le groupe aéronautique européen veut porter plainte après les informations selon lesquelles le renseignement allemand se serait livré à des écoutes pour le compte des Etats-Unis.
La chancelière allemande Angela Merkel, le 29 avril 2015 à Berlin. (Photo John Macdougall. AFP)
par AFP
publié le 30 avril 2015 à 15h35
(mis à jour le 30 avril 2015 à 18h32)

Le groupe aéronautique européen Airbus a annoncé jeudi qu'il allait déposer plainte contre X pour espionnage et qu'il avait «demandé des informations» à Berlin, après les accusations de presse selon lesquelles le renseignement allemand (BND) l'aurait espionné pour le compte de la NSA américaine.

En assurant «ne pas vouloir participer aux spéculations sur les accusations», un porte-parole a indiqué dans un courriel qu'Airbus était «inquiet, car il y avait des soupçons concrets d'espionnage industriel», que le groupe avait «demandé des informations au gouvernement fédéral» allemand et qu'il allait «maintenant porter plainte contre X pour des soupçons d'espionnage industriel».

La chancellerie aurait été informée

Le quotidien Bild avait affirmé lundi, sur la foi de documents de 2008 et 2010, que les services de renseignement allemands (BND) avaient tenté d'espionner depuis 2005 EADS (devenu Airbus) et Eurocopter (aujourd'hui Airbus Helicopters) pour le compte de l'agence américaine NSA.

La chancellerie était informée depuis 2008, sous le premier mandat de d'Angela Merkel, de telles pratiques visant des sociétés comme Airbus, mais n'a pas réagi pour ne pas froisser Washington et mettre en péril la coopération dans la lutte contre le terrorisme, a affirmé Bild.

Ces révélations, auxquelles sont venues s'ajouter mercredi des accusations d'espionnage politique visant notamment la Présidence de la République française ou la Commission européenne, embarrassent le gouvernement de la chancelière Angela Merkel, qui s'est toujours posé en victime de ses alliés.  Les accusations contre le BND ont en effet pris une nouvelle ampleur jeudi, le quotidien Süddeutsche Zeitung assurant que ces services ont espionné de «hauts fonctionnaires du ministère français des Affaires étrangères, du Palais de l'Elysée (siège de la Présidence de la république, ndlr) et de la Commission européenne».

«Je ne sais pas ce qui s'est passé. Ceci devra être réglé par les autorités allemandes, y compris parlementaires, et nous verrons», a commenté jeudi à Bruxelles le président de la Commission Jean-Claude Juncker, tandis que Paris disait être «en contact étroit avec (ses) partenaires allemands sur ce sujet».

Angela Merkel paraît intouchable

Plus que les accusations elles-mêmes, ce sont les éventuels mensonges du gouvernement qui enflammaient la presse allemande. «Qui dissimule quoi dans le scandale du BND ?», demandait Bild, et Angela Merkel était la première de sa liste. «Hier, elle est encore restée muette». Le gouvernement est accusé par l'opposition d'avoir menti en déclarant le 14 avril ne rien savoir d'un quelconque espionnage économique par la NSA. «Je récuse catégoriquement l'affirmation consistant à dire que le gouvernement n'a pas dit la vérité», a répliqué mercredi Steffen Seibert, porte-parole d'Angela Merkel.

L'un des proches de la chancelière, Thomas de Maizière, actuel ministre de l'Intérieur, était à l'époque ministre à la Chancellerie, tutelle des services de renseignement. Il a offert de s'expliquer la semaine prochaine devant la commission d'enquête parlementaire sur la NSA, sans convaincre. «Le cas de Maizière devrait être en tête de liste des priorités de la chancelière. Sinon, l'affaire va automatiquement se rapprocher encore d'elle», écrivait le quotidien économique Handelsblatt.

Et pourtant, si certains analystes envisageaient des conséquences pour l'avenir de Thomas de Maizière, la chef du gouvernement apparaissait intouchable. «Mme Merkel n'est menacée que si l'état-major de la CDU [Union chrétienne-démocrate, le parti conservateur qu'elle préside, ndlr] a le sentiment qu'elle pourrait ne pas gagner en 2017, ce qui n'est pas le cas actuellement», tranchait Gero Neugebauer, politologue à la Freie Universtität de Berlin. Il est généralement admis qu'Angela Merkel se représentera en 2017 pour un quatrième mandat, et en l'état actuel des sondages elle serait réélue haut la main.