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Libération
Récit

Nouveau séisme au Népal, «on est un peu désespérés»

Le Népal meurtridossier
Un nouveau séisme meurtrier de magnitude 7,3 s'est déclenché ce mardi matin, dix-huit jours après la catastrophe qui avait ravagé le pays.
Des habitants de Katmandou évacués mardi midi après un nouveau tremblement de terre. (Photo Athit Perawongmetha. Reuters)
publié le 12 mai 2015 à 15h27
(mis à jour le 12 mai 2015 à 18h57)

Ce mardi, plus de deux semaines après la catastrophe qui a fait plus de 8 000 morts, c'est une succession de onze secousses qui ont de nouveau atteint le Népal, un tremblement de terre d'une magnitude de 7,3, suivi de fortes répliques. Selon un bilan encore provisoire, ce nouveau séisme, ressenti jusqu'à New Delhi en Inde, aurait fait une cinquantaine de morts et plus d'un millier de blessés.

L'épicentre de ce très puissant tremblement de terre se situe au nord-est de Katmandou, près de Kodari, à la frontière tibétaine, non loin de l'Everest, dans les districts de Sindhupalchok et de Dolakha. Une région montagneuse et enclavée qui avait été, comme tout le pays, durement touchée par le tremblement de terre du 25 avril, de magnitude 7,8. Les bâtiments et les habitants avaient été frappés de plein fouet dès le lendemain par un deuxième séisme de 6,8, et le canton avait été classé ensuite zone la plus sinistrée du pays, l'immense majorité de ses habitations étant détruites et environ 2 000 morts étant à déplorer. La plupart de ses 400 000 habitants vivent désormais sous des abris de fortune, et ce nouveau puissant séisme est arrivé après six jours de pluies intenses.

«De nouveaux blessés commencent à arriver»

Caroline de Paulin, de l'ONG Solidarités International, se trouvait à Chautara, chef-lieu du Sindupalchok, à 1 800 mètres d'altitude, ce mardi matin : «Il y a eu une belle panique, tout le monde s'est retrouvé sur le stade de foot, où est installé le camp des Nations unies. Une douzaine de bâtiments se sont encore effondrés dans la rue principale. Heureusement, les équipes de recherche et de secours de l'armée, qui devaient redescendre à Katmandou aujourd'hui, étaient encore là. Elles se sont mises immédiatement à rechercher les victimes dans les décombres. [Lundi], les inspecteurs de la sécurité civile européenne avaient inspecté les maisons encore debout, et peint sur la plupart d'entre elles un point rouge, pour indiquer qu'elles devaient être détruites, les fondations étant trop endommagées. A 15 heures [11 h 15 en France, ndlr], la Croix-Rouge a annoncé que deux personnes avaient été amenées mortes à l'hôpital norvégien installé au camp, et que 40 se trouvaient en soins d'urgence. Il est difficile d'avoir des informations sur les zones reculées. On annonce des glissements de terrain, et la route de Katmandou serait bloquée.»

Marius Musca, coordinateur de la mission d'urgence de Médecins du monde au Népal, a pu être joint au QG de l'ONG à Katmandou : «Ce tremblement de terre a été très fort, et les répliques qui suivent le sont aussi. On se croirait sur un bateau, tellement la terre fait des vagues. Dans notre clinique de Golché, une zone isolée à plusieurs heures de marche de la première piste, que l'on a pu joindre par téléphone satellitaire, de nouveaux blessés commencent à arriver. Heureusement, notre infrastructure est opérationnelle, et notre staff est sain et sauf.»

«C’est comme si on nous narguait»

A Katmandou, Eloïse Dussably, une résidente française, se trouvait à son travail. «J'étais en réunion au 5étage, dans un bâtiment en partie effondré par le tremblement de terre du 25 avril, quand ça a commencé. J'ai attrapé mon boss, je l'ai poussé sous la table, des débris sont tombés du plafond. J'ai attendu la fin des secousses pour descendre, heureusement car deux marches se sont effondrées au 4étage. Je hurlais "Où est mon fils ?", et je suis devenue folle pendant vingt minutes, jusqu'à ce que mon mari m'envoie un SMS me disant que tout allait bien. On a bien flippé. C'est comme si on nous narguait : "Tu commençais à reprendre une vie normale, à travailler ? Eh bien tiens, prend ça." On avait recommencé à dormir dans la maison, mais au rez-de-chaussée, et [lundi], l'eau courante rétablie, j'avais même pris un bain au premier étage en me disant que je ne risquais plus rien. On est un peu désespérés. Heureusement que les écoles n'avaient pas encore rouvert.» Un système de réponse d'urgence en cas de séisme avait été mis en place par le consulat de France à Katmandou avant sa fermeture, l'an dernier. Un découpage de la capitale en îlots, avec des référents équipés de matériel radio pour recueillir rapidement des informations. Une consigne a été passée entre expatriés pour «recommencer à dormir dehors pendant soixante-douze heures».

Contactée par Libération, l'ambassade de France, qui n'a pas subi de nouveaux dégâts, rappelle que ses ressortissants qui ont besoin d'aide seront «bien sûr» accueillis, en attendant les instructions officielles de Paris. Mise en cause le 25 avril pour n'avoir pas été en mesure d'ouvrir ses portes aux centaines de Français venus chercher refuge dans le jardin, faute de conditions de sécurité suffisantes (murs d'enceinte écroulés, arbres fragilisés, quatre personnes seulement sur place), la petite ambassade avait ensuite rodé son système d'accueil, notamment pour les Français rescapés de la montagne. Dix Français ont été tués dans le séisme du 25 avril.

La semaine dernière, le gouvernement népalais déclarait que les expéditions pourraient reprendre sur l'Everest jusqu'à la fin de la saison. Les professionnels assuraient, eux, que c'était «trop risqué, car le sol n'était toujours pas stable».