Il a promis «une surprise» à venir bientôt sur le théâtre d'opérations syrien. Mais il s'est gardé de dire laquelle. Comme le général Qassem Soleimani est l'un des officiers iraniens les plus gradés – il est major général –, qu'il dirige la force Al-Qods – la division spéciale du corps des pasdaran (gardiens de la révolution) chargée des opérations militaires et du renseignement à l'extérieur de l'Iran –, qu'il est présent depuis des mois sur les fronts irakien et syrien et a été élu homme de l'année par le site iranien d'informations Khabaronline.ir (conservateur modéré) après un sondage, son effet d'annonce est pris au sérieux par les états-majors à Paris, Riyad, Ankara ou Washington.
«Dans les jours qui viennent, le monde va être surpris par ce que nous préparons, en coopération avec les chefs militaires syriens», a-t-il simplement déclaré, cité mercredi par la radiodiffusion de la République d'Iran. Cette «surprise» sera-t-elle l'engagement massif de Téhéran aux côtés des forces loyalistes, à l'heure où le régime de Bachar al-Assad apparaît de plus en plus épuisé par quatre années de guerre et incapable de reprendre l'offensive pour récupérer les villes qu'il a perdues dernièrement – Idlib, Jisr al-Choughour, Palmyre, pour ne citer que les principales ?
7 000 combattants déjà arrivés sur place
Mais l’inquiétude, c’est aussi Damas. L’Armée de la conquête, une coalition de partis islamistes dirigés par Ahrar al-Cham et le Front al-Nosra, la branche syrienne d’Al-Qaeda, a annoncé que c’était son prochain objectif.
Selon un membre des services de sécurité syriens cités par l'AFP, ce sont déjà «7 000 combattants iraniens et irakiens qui sont arrivés ces dernières semaines en Syrie pour la défense de la capitale». «Le plus important contingent est irakien. Le but est d'arriver à 10 000 hommes pour épauler l'armée syrienne et les milices pro gouvernementales, d'abord à Damas, et dans un second temps pour reprendre Jisr al-Choughour, car c'est le verrou vers la côte méditerranéenne et la région de Hama au centre du pays», a ajouté la même source, sous couvert d'anonymat.
Reste qu'il est difficile de savoir ce qui rélève ou non de la guerre psychologique que livrent l'Iran comme d'ailleurs ses adversaires. «Ce qui est sûr, c'est que Téhéran a envoyé aussi des centaines de combattants afghans hazâras [une ethnie chiite employée comme main d'oeuvre bon marché en Iran, ndlr]. Ils sont déployés à Alep et Damas, sous la bannière de de la Brigade des Fatimides», souligne le chercheur et politologue Ziad Majed. «Ce qui est certain aussi, c'est que des milliers de volontaires chiites irakiens sont arrivés dans la région de Damas. Eux sont surtout positionnés autour des mausolées chiites de la capitale», ajoute-t-il.
Il faut encore prendre en compte quelque 2 000 hommes du Hezbollah, venus en renfort dans le Qalamoun, près de la frontière libanaise, ce qui porterait au total le nombre des combattants de la milice chiite libanaise à 8 000 – on estime le nombre des pertes du Hezbollah entre 800 et 1 200 depuis 2012. D’ores et déjà, c’est Téhéran, en particulier le général Souleimani, qui semble diriger les opérations militaires en Syrie.
Barils d’explosifs
On a pu ainsi le voir dans la région de Lattaquié, au cœur du «réduit alaouite», où le régime viendrait se réfugier s’il perdait Damas. Il semble que Téhéran n’ait guère apprécié la façon dont les généraux syriens conduisent la guerre, en particulier l’offensive menée en février contre la métropole septentrionale d’Alep, qui avait échoué à couper l’approvisionnement des rebelles. La stratégie iranienne diffère de celle de Damas en ce qu’elle préfère contrôler moins de territoires mais bien les contrôler.
En avril, c’était déjà Qassem Soleimani, un vétéran de la guerre Iran-Irak (1980-1988) et de la guerre de la République islamique contre les Kurdes, qui conduisait les opérations militaires ayant permis de reprendre la ville de Tikrit en Irak.
Pour le moment, c’est la localité de Hassaké que le régime syrien et Téhéran voudraient sauver. Les jihadistes de l’Etat islamique (EI) y livraient ce vendredi de violents combats pour tenter de s’emparer de cette importante capitale provinciale. Selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH), l’armée loyaliste ne cesse de larguer des barils d’explosifs sur les territoires tenus par les insurgés, tuant en quarante-huit heures près de 100 civils, dont 20 enfants. La chute d’Hassaké donnerait à l’EI le contrôle d’une deuxième capitale provinciale après celle de Raqqa (nord), devenue son quartier général en Syrie.