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Libération

Vladimir Poutine rejoue la guerre des missiles

publié le 17 juin 2015 à 19h56

Si ce n'est pas une course à l'armement, cela commence à y ressembler. Il y a quelques jours, le New York Times a révélé que le Pentagone étudiait un projet de déploiement d'armes lourdes en Europe de l'Est. Mardi, Vladimir Poutine a annoncé que la Russie allait déployer plus de 40 nouveaux missiles balistiques intercontinentaux au sein de ses forces nucléaires, et mettre en service de nouveaux engins hypersophistiqués, dont un sous-marin lanceur d'ogives nucléaires, le Vladimir Monomaque. Pour l'Otan, ces propos sont «déstabilisants et dangereux». Soit. Mais ils ne sont pas nouveaux : ces missiles étaient prévus dans le programme de réarmement russe pour 2020. Poutine l'a simplement présenté comme une décision récente, en riposte aux projets américains.

En plus de frimer avec ses nouvelles fusées, Vladimir Poutine a rappelé que la Russie se tenait prête à se défendre contre l'Otan qui «arrive à ses frontières» : «Si quelqu'un place sous la menace certains de nos territoires, nous devons pointer nos forces armées et notre force de frappe vers les territoires d'où vient la menace.»

Le président Poutine a recours à la stratégie de la corde raide, héritée de la guerre froide. «Pour que cette stratégie fonctionne, prévient l'expert miliaire Pavel Felgenhauer, il faut être crédible. C'est-à-dire paraître suffisamment fou pour avoir recours à une arme de destruction massive qui anéantira aussi la Russie. Il faut surtout que le potentiel nucléaire soit pris au sérieux. C'est pourquoi le nucléaire est considéré comme essentiel dans le réarmement en cours.» Le budget militaire russe représente aujourd'hui 21% du budget total de la Russie, et a doublé depuis 2010. Afin de moderniser son arsenal, Moscou compte encore dépenser plus de 331 milliards d'euros d'ici à 2020. «Mais la crise ukrainienne n'y est pour rien, assure le directeur du Centre d'étude des tendances stratégiques, Ivan Konovalov. Tous les contrats qui sont réalisés en ce moment ont été conclus plus tôt.» Car l'état-major russe pronostique carrément une guerre totale pour l'après-2025.

Pour l'heure, Moscou pointe du doigt Washington et l'accuse d'entraîner la Russie dans une course aux armements dont elle ne veut pas. Pour Konovalov, «pour l'instant, il s'agit plutôt d'une guerre de nerfs, analyse l'expert. Cette guerre est d'ailleurs provoquée et entretenue par les Américains, qui tâtent les positions de la Russie pour voir jusqu'où ils peuvent aller dans la confrontation.»