Les Grecs ont montré leur jeu. Et leurs propositions ressemblent presque goutte pour goutte au texte qui était discuté par les «institutions» le 26 juin, avant qu’Aléxis Tsípras n’annonce un référendum sur les propositions de la veille. On y parle de réforme des retraites, d’augmentations de la TVA (même sur les îles), de réduction du budget de la défense, de lutte contre la fraude et l’évasion fiscale et d’objectif de 3,5% d’excédent budgétaire primaire pour 2018. En contrepartie, le gouvernement grec espère obtenir 53,5 milliards d’euros du mécanisme européen de stabilité et une restructuration de la dette, même si le terme n’apparaît pas dans les courriers adressés par Tsípras à ses créanciers ou par le ministre des Finances Euclide Tsakalotos à Jeroen Dijsselbloem, président de l’Eurogroupe.
C’est ce samedi 11 juillet que les ministres des Finances de la zone euro se réuniront pour discuter de ce texte, sur la base d’une évaluation conjointe que le FMI, la Commission européenne et la Banque centrale européenne (BCE) mènent ce vendredi. Cet Eurogroupe devrait être suivi, dimanche, d’un sommet de la zone euro.
Un plan sérieux ?
Le plan grec sera-t-il considéré comme assez sérieux pour permettre un accord ? Pour Daniel Gros, directeur du CEPS (Centre for European Policy Studies), «ces propositions vont créer des difficultés à ceux qui veulent que la Grèce n'appartienne plus à la zone euro». Car tout ce qui était discuté le 26 juin, ou presque, figure dans le texte grec. On ne peut pourtant pas garantir que cela suffise. Certains gouvernements sont toujours convaincus que l'euro serait mieux sans la Grèce et que la Grèce serait mieux sans Tsípras. Ces pays pourraient toujours se montrer «très durs sur les détails», pense Daniel Gros. Un de ces détails, et pas le moindre, est la prise en compte, ou non, de la situation économique actuelle de la Grèce.
«Ces mesures qui paraissaient suffisantes le 26 juin n'auront pas le même impact aujourd'hui car la situation économique a empiré. Il y aura un déficit cette année en Grèce», ajoute Daniel Gros. L'incertitude, le contrôle des capitaux et la fermeture des banques sont passés par là. Tout dépendra donc de l'intransigeance des Etats autour de la table. Des Etats, et, plus largement, des créanciers qui, selon Roland Gillet, professeur d'économie à la Sorbonne et très proche des négociations, «veulent surtout évaluer la crédibilité et la faisabilité des propositions» : «A quoi bon augmenter le taux de TVA lorsqu'on ne parvient pas à prélever les impôts ? Une des priorités est de mettre en place un système crédible d'administration fiscale.»
Le point d’interrogation de l’Allemagne
En attendant, chacun guette les premières réactions des dirigeants européens. François Hollande a jugé «crédibles» les propositions grecques. C'est la moindre des choses lorsqu'on sait que les négociateurs français ont aidé les Grecs à mettre la dernière touche à leur plan d'action, comme on le découvrait sur le site Politico. L'Italie de Renzi se montre «plus optimiste», mais l'Allemagne est silencieuse. Poussera-t-elle au Grexit, comme le souhaite une partie de sa classe politique ? «L'Allemagne reste un point d'interrogation», estime Daniel Gros. Car Angela Merkel, si elle s'est prononcée contre un effacement partiel de la dette, n'a pas encore d'opinion tranchée sur le Grexit, contrairement à son ministre des Finances, Wolfgang Schaüble, qui considérait en début de semaine que les ponts étaient coupés avec le gouvernement Tsípras.
Même dans l’hypothèse d’un accord, samedi, en Eurogroupe, les Grecs ne seraient pas au bout de leurs peines. Le Bundestag devra lui aussi se prononcer sur le plan d’aide. D’autres pays soumettront l’accord au vote de leur Parlement national, à commencer par les Pays-Bas et la Finlande. Des Etats peu disposés à financer encore la Grèce.