Au moins 96 personnes, en majorité des civils, ont été tuées dans un raid de l'aviation syrienne dimanche à Douma, fief rebelle près de Damas, selon un nouveau bilan donné lundi. Il s'agit de l'une des plus sanglantes attaques du régime depuis le début de la guerre. «Le bilan s'est alourdi à 96 morts dont au moins deux femmes et quatre enfants», a indiqué l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH) en précisant que le nombre de victimes risque de croître en raison de l'état critique de nombreux blessés. Le bombardement des forces du président syrien Bachar al-Assad sur un marché de Douma a également fait au moins 240 blessés, a ajouté l'OSDH, une ONG qui dispose d'un large réseau de sources à travers la Syrie.
Un photographe de l’AFP sur place a décrit l’attaque comme étant la pire qu’il ait couverte à Douma, une ville située dans la région de la Ghouta orientale, principal fief des rebelles dans la province de Damas assiégé et régulièrement pilonné par les forces du régime. Il a décrit des habitants affolés emmenant dans un hôpital de fortune un grand nombre de blessés qui, faute de place, devaient parfois être soignés à même le sol. Le sol était recouvert par endroits de dizaines de cadavres alignés. Des enfants ensanglantés criaient. Une vidéo mise en ligne dimanche par des militants montre une scène de dévastation à un carrefour où l’on peut voir des véhicules calcinés au milieu des gravats. Plusieurs façades d’immeubles se sont effondrées.
«Il s'agit d'un massacre délibéré», a affirmé à l'AFP Rami Abdel Rahmane, directeur de l'OSDH. «Assad commet un nouveau massacre à Douma, en visant un marché bondé», a dénoncé pour sa part la Coalition de l'opposition syrienne en exil sur Twitter.
L'armée de l'air a frappé Douma, une ville située à 13 km au nord-est de Damas et presque quotidiennement meurtrie par des raids aériens, principale arme du régime contre les insurgés. «Le régime a frappé six fois sur un marché populaire dans le centre de Douma et quatre fois dans les environs. Il y a au moins 82 morts et plus de 250 blessés», avait dans un premier temps indiqué à l'AFP Rami Abdel Rahmane. «Après la première frappe, les gens se sont rassemblés et les autres frappes ont suivi», a-t-il expliqué, précisant que de nombreux blessés se trouvaient dans un état grave.
«Crimes de guerre»
Les frappes de dimanche coïncident avec la visite du patron des affaires humanitaires de l'ONU, Stephen O'Brien, sa première en Syrie. Il doit tenir une conférence de presse lundi. Arrivé samedi, O'Brien a affirmé qu'il venait «évaluer les besoins du peuple syrien afin de lui offrir de l'aide humanitaire», selon la traduction en arabe de l'agence officielle syrienne Sana. Stephen O'Brien avait souligné samedi sur Twitter l'engagement des Nations unies à poursuivre leur «soutien aux efforts humanitaires en Syrie», pays qui compte au moins 7,6 millions de déplacés sur son territoire et 422 000 civils assiégés par les belligérants, selon l'ONU. Selon des déclarations rapportées par Sana, le responsable a affiché sa détermination à éviter toute politisation du dossier humanitaire en Syrie, où le conflit entre régime, rebelles, jihadistes et Kurdes a fait plus de 240 000 morts en quatre ans, selon une ONG. Plus de quatre millions de Syriens ont fui le pays depuis 2011.
Mercredi, un rapport d'Amnesty international avait accusé le gouvernement syrien de commettre des «crimes de guerre» dans cette région, parlant d'«attaques directes, aveugles et disproportionnées».
Dans la province de Homs (centre), au moins 27 combattants de l’opposition et 15 membres des forces gouvernementales ont été tués dans des combats depuis samedi autour du village de Tasnine, selon l’OSDH. Par ailleurs, les négociations entre rebelles et forces prorégime – impliquant notamment des médiateurs iraniens et le Hezbollah libanais – pour mettre fin aux combats dans trois localités du nord et du centre du pays ont échoué samedi.
Un accord devait permettre à 50 000 civils d’évacuer Foua et Kafraya, deux villages chiites du nord-ouest aux mains du régime, en échange de la sortie de rebelles de Zabadani, dernière place forte des insurgés près de la frontière avec le Liban. Mais après une trêve qui a tenu trois jours, les négociations se sont arrêtées, les insurgés réclamant en plus la libération de milliers de prisonniers, ce que refuse le régime. Les affrontements se poursuivaient dimanche, selon l’OSDH.
La prise de Zabadani permettrait au régime de sécuriser le long de sa frontière avec le Liban. Pour les rebelles, le contrôle de Foua et Kafraya consacrerait leur mainmise totale sur la province d’Idleb.