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Libération
Récit

Camions de la honte : Vienne va renforcer les contrôles

Migrants, réfugiés... face à l'exodedossier
Une camionnette a été interceptée samedi avec 26 personnes, vivantes, à bord. L'Autriche va dès dimanche surveiller les poids lourds arrivant à ses frontières orientales.
Les cercueils de migrants retrouvés morts dans un camion sont évacués, le 28 août 2015, à Nickelsdorf, en Autriche. (Photo Vladimir Simicek. AFP)
publié le 30 août 2015 à 13h47

A peine commençait-on à procéder à l’identification des 71 victimes du «camion de la honte», en Autriche, qu’un deuxième véhicule, une camionnette blanche, était intercepté à la frontière allemande. Avec, cette fois, 26 migrants, serrés les uns contre les autres, certes, mais vivants. Parmi eux, une fratrie de trois enfants déshydratés a été hospitalisée. Les deux fillettes de cinq ans et le garçon de six ans, pris en charge immédiatement par l’hôpital le plus proche, dans la ville de Braunau, en sont ressortis dimanche matin, en bonne santé. Leurs parents veulent maintenant poursuivre leur chemin vers l’«eldorado» allemand, après avoir déjà passé vingt jours sur les routes avec très peu de nourriture et d’eau. Aucun des migrants, des Syriens, des Bangladais et des Afghans, n’a déclaré vouloir déposer de demande d’asile en Autriche. Le passeur présumé, lui, va rester dans le pays. Il s’agirait d’un Roumain de 29 ans qui a été écroué, après une courte course-poursuite.

Cette découverte intervient alors que la police hongroise a annoncé l’interpellation, dans la nuit de samedi à dimanche, d’un cinquième suspect, un Bulgare, en relation avec l’affaire du «camion charnier» trouvé en Autriche. Quatre hommes, trois Bulgares et un Afghan, arrêtés vendredi en Hongrie, avaient déjà été présentés samedi au tribunal de Kecskemét, une ville située entre Budapest et la frontière serbe, d’où serait parti le véhicule. Les suspects nient les faits qui leur sont reprochés.

Téléphones portables 

A Vienne, on se concentre sur l’identification des victimes, notamment grâce à des tests ADN. Six corps ont été analysés vendredi, huit autres samedi. Les autorités cherchent aussi à contacter leurs proches et espèrent pouvoir y arriver rapidement, grâce à la dizaine de téléphones portables retrouvés dans le camion. Helmut Marban, un porte-parole de la police, a indiqué que tout était fait pour que les 59 hommes, huit femmes et quatre enfants, ne soient pas enterrés de manière anonyme. Mais à part un passeport syrien et les vêtements portés, peu d’indices ont été retrouvés.

Le poids lourd abandonné a été découvert jeudi, sur la bande d’arrêt d’urgence d’une autoroute autrichienne, non loin de la frontière hongroise. Selon les premiers éléments de l’enquête, les migrants sont morts asphyxiés et leur décès remonterait à un ou deux jours. Leur nationalité aussi est encore inconnue. Mais dans l’est de l’Autriche, jusqu’à présent, les migrants qui arrivaient étaient principalement Afghans, Syriens, Pakistanais et Irakiens.

Fils de fer

L'Autriche va rétablir le contrôle des poids lourds à ses frontières orientales dès dimanche soir. Dans la région du Burgenland, 50 soldats sont déployés pour épauler la police et la Croix-Rouge dans leur prise en charge des migrants. Une messe sera dite lundi par l'archevêque de Vienne, le cardinal Christoph Schönborn, en mémoire des réfugiés, à la cathédrale Saint-Etienne. Toutes les cloches du pays devraient sonner au même moment, alors que le pape François estime que ce drame «offense l'humanité entière» et recommande aux chrétiens de se mobiliser, plus que jamais, pour accueillir les migrants.

C'est peu dire qu'il est mal entendu par les autorités des pays d'Europe centrale. La Hongrie a achevé la construction d'une clôture de fils de fer barbelés, sur les 175 kilomètres de sa frontière avec la Serbie. Un millier de policiers sont déployés sur place, alors que depuis début janvier, 140 000 personnes sont entrées dans l'espace Schengen par cette zone. Laurent Fabius, le ministre français des Affaires étrangères, s'est dit dimanche très «sévère» envers Budapest qui, selon lui, ne «respecte pas les valeurs communes de l'Europe», en posant des grillages à sa frontière. Pour lui, il faut «bien sûr» que la Hongrie démantèle ce mur et que l'Union européenne ait «une discussion sérieuse et sévère» avec les dirigeants hongrois. Berlin, Paris et Londres sont partisans d'une réunion des ministres de l'UE dans les deux prochaines semaines, pour tenter, de nouveau, de présenter un front commun face à la crise.