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RDC : Bosco «Terminator» Ntaganda jugé à La Haye

L'ancien chef de guerre congolais est accusé de crimes contre l'humanité et de viols sur des enfants soldats de sa milice. Son procès devant la Cour pénale internationale s'est ouvert ce mercredi.
Bosco Ntaganda, le premier jour de son procès à la CPI, le 2 septembre 2015. (Photo Micharl Kooren. AFP)
publié le 2 septembre 2015 à 15h31

Impassible, vêtu d'une chemise blanche, Bosco Ntaganda, tantôt surnommé «Terminator» ou «maréchal», a été présenté mercredi à l'audience de la Cour pénale internationale (CPI) présidée par le juge Robert Fremr. La procureure Fatou Bensouda avait affirmé, mardi, lors d'une conférence de presse, que Bosco Ntaganda avait «recruté des centaines d'enfants soldats qu'il a utilisés comme de la chair à canon et [qu'il] a ordonné le viol systématique des jeunes filles».

Bosco Ntaganda est accusé de treize crimes de guerre et cinq crimes contre l’humanité : meurtres, pillages, attaques contre des civils, viols et esclavage sexuel. L’ancien rebelle aurait joué, avec ses troupes des Forces patriotiques pour la libération du Congo (FPLC), un rôle central dans les violences ethniques et les attaques menées contre les civils en Ituri, dans le nord-est de la République démocratique du Congo (RDC), en 2002 et 2003.

Esclavage sexuel

Selon l'accusation, les FPLC, milice à prédominance Hema, visaient ceux perçus comme appartenant aux ethnies Lendu, Bira et Nande. Ce conflit a coûté la vie à plus de 60 000 personnes, d'après les ONG. C'est la première fois en droit pénal international qu'un accusé doit répondre de viols et d'esclavage sexuel commis sur des enfants de sa propre milice. «Il ne s'agit pas du procès d'un groupe ethnique, c'est le procès d'un individu qui a profité des tensions ethniques en Ituri à des fins personnelles, pour atteindre le pouvoir et la richesse», avait ajouté la procureure Bensouda.

Au cours du procès, l'accusation devrait présenter plus de 8 000 documents, dont des rapports d'experts, des extraits vidéo et des déclarations. Plus de 70 «témoins de faits» et une dizaine d'experts seront cités, a assuré Fatou Bensouda. Bosco Ntaganda «maintient son innocence face à chacune des accusations portées contre lui et il entend présenter une défense exhaustive», a indiqué son avocat canadien, Stéphane Bourgon : «Il est impatient d'avoir une chance de se défendre.»

Plus de 2 000 victimes

Grand, teint clair, avec une haute idée de lui-même, selon les témoignages, Bosco Ntaganda a été général dans l’armée congolaise de 2007 à 2012. Puis il a été qualifié de fugitif le plus recherché dans la région des Grands Lacs jusqu’à ce qu’il se rende, de manière inopinée. Il s'était présenté à l’ambassade américaine de Kigali au Rwanda, en mars 2013, pour demander son transfert… à la CPI.

Du génocide des Tutsis au Rwanda (1994) à la dernière rébellion du Mouvement du 23 mars (M23) dans l'est de la RDC, cet «aventurier» opportuniste aura été de toutes les guerres qui ont déchiré la région, entraînant des violences inouïes sur les civils. Les avocats des 2 149 victimes reconnues dans le cadre des procédures auront également la parole : «Nos clients avaient entre sept ans et demi et quinze ans quand ils ont été enrôlés, a affirmé l'une des avocates, Sarah Pellet. Leur reconstruction passe par la reconnaissance des crimes qu'ils ont subis».

Le procès de Bosco Ntaganda est le quatrième procès «congolais» de la CPI, qui avait fait des violences en RDC sa première enquête en 2004. «Terminator» plaide non coupable. A la prison de La Haye, il s’est mis au piano et à l’anglais…