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Libération
Reportage

A Salzbourg, salle d’attente des réfugiés vers l’Allemagne

Migrants, réfugiés... face à l'exodedossier
La gare de la ville autrichienne a vu passer 2 200 migrants lundi, dans une atmosphère assez électrique.
Des policiers face à la foule des migrants le 14 septembre 2015 à Salzbourg. (Photo Guenter Schiffmann. AFP)
publié le 15 septembre 2015 à 16h24

Dans la gare de Salzbourg, en sortant du train venant de Vienne, l'ingénieur syrien Ibrahim al-Naser, père de six filles et d’un garçon, constate lundi une grande pagaille. Des centaines de migrants, impatients de rejoindre leur pays de destination, jouent des coudes, devant un cordon de police. L’accès au quai est pris d’assaut : après des heures d’attente, un Railjet de la compagnie autrichienne ÖBB est enfin annoncé. Il desservira Munich.

Hurlant dans un haut-parleur, un bénévole somme, en arabe, les hommes les plus jeunes de laisser passer les familles en premier. Peine perdue : nombreux sont les migrants qui ne veulent plus attendre ici. Résigné, Ibrahim al-Naser, 55 ans, se dirige alors avec trois filles adolescentes et un petit garçon vers la grande tente de la Croix-Rouge, située sur le parvis. Il veut trouver des médicaments pour Hamod, 10 ans, qui a mal à la tête. «C'est difficile, lance-t-il ironiquement, sur un ton résigné. Mais la peur m'a quitté. Ce n'est pas le pire, ce voyage. Le pire, c'est la Syrie.»

Des familles séparées

Originaire de Deir ez-Zor, zone désormais sous influence de l’Etat islamique, la famille, qui n’avait pas assez d’argent pour emmener tout le monde, est aujourd’hui séparée. Rokea, la mère, a rejoint des connaissances à Damas, avec les deux plus petites de leurs filles et l’aînée.

Le garage souterrain de la gare de Salzbourg a été transformé en un immense dortoir. Des dizaines de lits de camp sont alignés, dans une ambiance assez sordide. Comme ailleurs en Autriche, les associations et la société civile restent mobilisées. Il y a même un groupe de scouts, très sympa. «On a apporté des crayons et du papier pour dessiner un peu avec les enfants. Cela va leur changer les idées», explique tout sourire l'un d'entre eux, Thomas Gefahrt.

 A pied vers la frontière

Certains migrants ont décidé de chercher un taxi pour gagner la frontière, distante de 7 kilomètres. «Mais je ne peux prendre que ceux qui ont des papiers», affirme un chauffeur à quatre Syriens. Au bout de deux heures de marche dans un décor périurbain, le petit groupe arrive derrière un pont, qui enjambe la rivière Salzach. Il y a une petite forêt, puis, de l'autre côté de la frontière, la commune bavaroise de Freilassing.

Et là, surprise : après avoir provoqué des bouchons mémorables sur la B155, la police allemande, certes présente, laisse désormais passer tout le monde. Seules quelques fourgonnettes sont arrêtées de temps en temps. Pour la forme, on fait ouvrir le coffre, on réclame des papiers devant un groupe de trois gamins du coin qui assistent au spectacle sous la pluie. L'un d'eux s'exclame : «Ça serait trop cool s'ils arrêtaient des passeurs.» Mardi, la police allemande a annoncé que 2 000 migrants sont arrivés lundi en Bavière. Elle a arrêté 43 passeurs.