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grand écart

Munich : après les réfugiés, la Fête de la bière

Six millions de visiteurs sont attendus pour l'Oktoberfest ce week-end.
Fin de la 180e fête de la bière à Munich, le 6 octobre 2013. (Photo Michaela Rehle. Reuters)
publié le 19 septembre 2015 à 9h27

Munich fait le grand écart ce week-end, pris entre l’afflux des migrants et la Fête de la bière, qui débute ce samedi. Six millions et demi d’adeptes de cette beuverie devenue au fil des ans la plus grande fête populaire au monde ont éclusé l’an passé autant de litres de bières sur la «Wiesn», la «Prairie» où se dressent traditionnellement les tentes des festivités. Des tentes abritent aussi de plus en plus souvent en Allemagne les dizaines de milliers de réfugiés qui continuent d’affluer chaque semaine dans le pays.

A quelques encablures de la sortie sud de la gare centrale, de gigantesques affiches «Willkommen Oktoberfest» (bienvenue, Fête de la bière) ornent l'entrée de la «Wiesn». Vers la sortie nord, les comités d'accueil mis en place par les organisations humanitaires et les bénévoles accueillent les réfugiés avec de plus modestes cartons «Wilkommen Refugees», des sandwichs et des bouteilles d'eau.

Une fête «tout à fait normale – avec juste un petit quelque chose d’inhabituel»

Pas question que l’afflux des migrants gâche la principale attraction touristique de Munich, qui génère 1 milliard d’euros pour l’économie locale. Exaspérée par l’ouverture des frontières décrétée par Angela Merkel, la direction de la CSU - les conservateurs bavarois, alliés à la chancelière - avait multiplié les pressions la semaine dernière pour réduire le flux d’arrivées. Berlin a finalement rétabli dimanche dernier les contrôles aux frontières mais les migrants continuent d’affluer chaque jour en Bavière en provenance d’Autriche : mercredi, on en a compté plus de 9 000.

Dès samedi, des centaines de policiers dépêchés en renfort par Berlin seront là pour assurer le bon déroulement de la fête. «Ce n'est pas une Wiesn de crise, assure Wilfried Blume-Beyerle, fonctionnaire chargé d'organiser les festivités. C'est une Wiesn tout à fait normale – avec juste un petit quelque chose d'inhabituel.»

«Séparer autant que possible les différents groupes de personnes»

Le très conservateur ministre de l'Intérieur du Land, Joachim Herrmann (CSU), a précisé les choses à sa façon : «Les demandeurs d'asile en provenance de pays musulmans ne sont pas habitués à rencontrer en public des gens extrêmement ivres.» Les trains de migrants arrivent en général en fin de soirée à la gare centrale, l'heure où les amateurs de bière incapables de souffler dans le ballon se dirigent eux aussi vers la gare pour rejoindre leur campagne.

«Nous avons pour objectif de séparer autant que possible les différents groupes de personnes afin d'éviter les situations de conflit», a poursuivi le ministre, devenu la risée du pays. «Bien sûr, il voulait dire tout l'inverse, s'offusque un éditorialiste de la chaîne de radio publique WDR. La Bavière veut surtout éviter de confronter les visiteurs de la Fête de la bière avec la misère de réfugiés épuisés.» Munich fera ce week-end le grand écart.