L’Arabie saoudite a renoué jeudi avec les grandes tragédies qui, régulièrement, endeuillent le hajj, le grand pèlerinage de La Mecque. Cette année, ce sont au moins 720 fidèles qui ont été tués et des centaines d’autres blessés – quelque 900, selon des chiffres provisoires – dans la vallée de Mina, à quelques kilomètres de la ville sainte, lors du rituel de la lapidation de Satan, ce qui fait de cette catastrophe la plus meurtrière de ces 25 dernières années.
Quelles sont les circonstances du drame ?
Rappelant celle de 1990, où quelque 1 500 pèlerins avaient péri piétinés et asphyxié, la bousculade est survenue à l'intersection de l'allée 204, entre Mina et le site de Jamara, où les pèlerins se doivent de jeter 49 ou 70 petits cailloux sur trois stèles représentant Satan. C'est la rencontre, à l'intersection de deux voies aménagées pour faciliter le mouvement des fidèles dans la vallée de Mina, de deux véritables marées humaines, l'une quittant l'une des stèles, l'autre arrivant en sens inverse, qui a provoqué la catastrophe. Elle survient au premier jour de l'Aïd al-Adha, la fête du Sacrifice et la plus importante de l'islam. Comme à leur accoutumée, les autorités saoudiennes, qui ont la charge de gérer le hajj, ont rejeté la faute sur les pèlerins eux-mêmes, leur reprochant un manque de discipline. «Si les pèlerins avaient suivi les instructions, on aurait pu éviter ce genre d'accident. De nombreux pèlerins se mettent en mouvement sans respecter les horaires» (fixés par les responsables de la gestion des rites du hajj, ndlr). C'est la raison principale de ce genre d'accident», a ainsi commenté le ministre de la Santé Khaled al-Faleh, à la télévision El-Ekhbariya, après s'être rendu à Mina. Rappelant les accidents précédents, les images vidéo publiées en ligne montrent de nombreux corps inertes jonchant le sol, recouverts ou non de draps blancs, ainsi que des affaires personnelles éparpillées, des chaussures et des parapluies, dont les pèlerins se servent pour se protéger du soleil. On y découvre aussi une immense pagaille, avec des services d'urgence dépassés par l'ampleur de la catastrophe et des fidèles hagards, les hommes reconnaissables à leurs deux pièces de tissu blanc non cousues, et les femmes à l'habit couvrant leur corps à l'exception du visage et des mains.
C'est le second accident en quelques jours qui survient pendant le hajj. Il y a 13 jours, le 11 septembre, 109 personnes périssaient dans l'effondrement d'une énorme grue sur le chantier d'agrandissement de la Grande Mosquée à La Mecque.
Quels sont les précédents ?
C’est à Mina que se concentrent la majorité des accidents. Ces 15 dernières années, environ 3500 pèlerins y sont morts lors de bousculades suite à des mouvements de foules entre les trois stèles représentant Satan. L’incident le plus grave remonte au 2 juillet 1990. Ce jour-là, plusieurs milliers de fidèles progressaient dans le tunnel long d’un kilomètre qui conduit à Mina lorsque les systèmes de ventilation tombent en panne. La chaleur devient vite insupportable et la foule panique. Après avoir vainement tenté de minimiser le drame, le ministère saoudien de l’Intérieur annoncera un bilan de 1426 morts. Les bousculades se succéderont les années suivantes, jusqu’à celle de ce jeudi. En 1997, un incendie provoqué par un réchaud à gaz avait ravagé des campements de toile dans la vallée de Mina, provoquant la mort de 343 personnes. A chaque fois, le royaume est mis en cause pour son incapacité à organiser un pèlerinage suivi par deux millions de personnes.
Les grands drames à la Mecque