Pendant les discussions sur le statut de Jérusalem au début des années 2000, l’un des négociateurs palestiniens nous confiait son désarroi face à l’imbroglio territorial que les Israéliens leur proposaient : «Si nous signons un accord sur ces bases, il faudra à l’avenir équiper les chaussures de tous les Palestiniens de petites lumières rouges. Elles s’allumeront aussitôt qu’ils entreront par mégarde en zone C (sous contrôle israélien) et s’éteindront lorsqu’ils reviendront en zone A ou B (sous contrôle palestinien ou mixte).» Maintenant, en ville, il y a le mur. Un mur de béton, immense, de 8 à 10 mètres de haut qui déchire le paysage aux marges de la ville, pénètre au cœur de la cité, fracture l’espace urbain et surtout l’espace social palestinien. La frontière légitime, la Ligne verte, reconnue internationalement, est niée sur le terrain comme sur les cartes israéliennes. Elle est invisible. Le mur, lui, est bien visible… Il a été déclaré illégal par la Cour internationale de justice en 2004. Bien qu’illégitime, avec ses check-points qui ressemblent à s’y méprendre à des postes de douane, il fait office de vraie frontière, laquelle est ancrée parfois très loin à l’intérieur du territoire palestinien toujours occupé. Comme l’explique cette ancienne responsable de l’ONG Bimkom, «les Israéliens ont construit ce mur pour limiter les risques d’attentats-suicides. Et statistiquement, ils ont eu raison, puisque les attaques se sont pratiquement arrêtées, sans toutefois être vraiment sûrs qu’il y ait une relation directe. Par contre, le mur (qui sépare plus souvent des Palestiniens d’autres Palestiniens) a brisé la vie quotidienne de millions d’individus coupés de leurs espaces de vie, de leurs hôpitaux, de leurs écoles, de leurs amis, et enfin, de leur famille».
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