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Libération
Crispation

Pourquoi l'approche russe en Syrie pose problème

Le Kremlin estime être dans son bon droit en agissant sur demande d'Al-Assad. Il balaie les «doutes» occidentaux sur ses frappes, mais sur le terrain, ne fait aucune distinction entre les différents opposants au régime syrien.
Vladimir Poutine, le 28 septembre aux Nations unies, à New York. (Photo Spencer Platt. AFP)
publié le 1er octobre 2015 à 13h15

Bien qu’attendue, l’intervention russe a pris les Occidentaux de court, et provoqué l’inquiétude, tant les objectifs et les motifs de Poutine ne sont pas clairs, ou du moins tant la méfiance domine les relations du président russe avec ses homologues américain et européens. Poutine est revenu au centre de l’échiquier syrien en déployant des forces militaires considérables en Syrie, pour soutenir l’armée d'Al-Assad, en demandant avec insistance que le président syrien soit intégré au plan de sortie de crise. Malgré ses déclarations, le chef du Kremlin n’a pas réussi à convaincre complètement que sa priorité est bien de combattre l’EI, et non pas de sauver le régime syrien. Et les premières frappes russes dans les provinces de Hama, au nord-ouest, et Homs, dans le centre de la Syrie, n’ont pas dissipé les soupçons. Au contraire.

A Paris comme à Washington, on s'inquiète de l'objectif réel de ces frappes. «Il semble qu'elles étaient dans des zones où il n'y avait probablement pas de forces de l'Etat islamique», a dit le secrétaire américain à la Défense Ashton Carter, en avertissant que l'approche russe «tournera mal» si elle se fixe pour unique objectif de défendre le régime du président syrien. Ce matin, le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, a balayé ces insinuations, en qualifiant les doutes des Occidentaux d'«infondés». Sa porte-parole s'était empressée hier d'affirmer que « la diffusion d'informations par les médias étrangers disant que des civils étaient touchés par les opérations militaires russes s'inscrivait dans une guerre de l'information menée contre la Russie».

«Prendre de vitesse les terroristes»

Moscou martèle qu’il est dans son bon droit, contrairement à tous les autres acteurs du conflit, puisque son implication en Syrie s’appuie sur une demande officielle d’aide du président Al-Assad, alors que les Occidentaux agissent sans l’accord du gouvernement syrien, ni même un mandat de l’ONU.

En s'adressant mercredi à son gouvernement, Poutine a résumé son plan : «Le seul moyen de lutter efficacement contre le terrorisme international – en Syrie comme sur les territoires voisins – […] est de prendre de vitesse, de lutter et de détruire les combattants et les terroristes sur les territoires qu'ils contrôlent et ne pas attendre qu'ils arrivent chez nous», a expliqué le président russe. Le problème, c'est que Poutine n'a pas la même définition des «terroristes à abattre» que ceux qu'il appelle «ses partenaires occidentaux». Les Européens, les Américains, et les pays arabes font la distinction entre l'Etat islamique, ou le Front al-Nusra (branche d'Al-Qaeda en Syrie) et les rebelles modérés qu'ils soutiennent. Pour Moscou, tout opposant armé au régime de Bachar al-Assad est un «terroriste».