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Libération
Interview

Prix Nobel de la paix : «Un énorme souffle pour continuer»

Ali Zeddini, vice-président de la Ligue tunisienne des droits de l’homme, réagit après l'attribution du Nobel au Quartette qui regroupe notamment son organisation.
Un homme, drapé dans le drapeau tunisien, devant un mur couvert de graffitis sur l'avenue Mohamed Bouazizi, à Sidi-Bouzid en 2013. (Photo Fethi Belaid. AFP)
publié le 9 octobre 2015 à 15h49

Le Nobel de la paix a été attribué ce vendredi au «Quartette pour le dialogue national tunisien». Les quatre organisations qui la conduisent, le syndicat UGTT, syndicat historique en Tunisie, la fédération patronale Utica, l'Ordre national des avocats et la Ligue tunisienne des droits de l'homme, ont été primées «pour [leur] contribution décisive à la construction d'une démocratie pluraliste à la suite de la Révolution de jasmin de 2011». Ce groupe hétéroclite a en effet permis de sauver à l'automne 2013 la transition démocratique, deux ans et demi après le «Printemps arabe» de 2011. Ali Zeddini, le vice-président de la Ligue tunisienne des droits de l'homme, réagit à ce prix.

Quelle a été votre réaction en apprenant la nouvelle ? 

Je suis très ému et c’est une immense fierté. On ne s’y attendait pas du tout cette année. Ce que nous avons fait est grandiose. C’est une récompense pour tous les efforts menés par le Quartette.

Que représente ce Nobel de la paix pour la Tunisie ?  

C’est aussi une récompense pour toute la société civile tunisienne qui a joué un rôle prépondérant dans le dénouement de la crise et la transition démocratique avec le Quartette. Quand la Tunisie était en proie à une crise profonde, nous avons rassemblé tout le monde autour de la table et c’était magnifique. Il nous a fallu beaucoup de temps, beaucoup de patience, pour parvenir à un accord mais l’essentiel est dans le résultat. Cela montre qu’on peut respecter le droit à la différence en ayant un esprit de consensus.

Ce Nobel de la paix récompense ainsi un procédé spécifiquement tunisien loin de toutes ingérences internationales. Nous avons contribué à mener des élections libres, transparentes et démocratiques. Nous avons aujourd’hui un gouvernement, une opposition, une société civile très forte. Pour nous, cela met aussi fin au climat morose de ces derniers temps, avec notamment ce jeudi la tentative d’assassinat du député tunisien du parti laïque Nidaa Tounes.

Ce prix est aussi une grande responsabilité…

Oui, c’est une gratification mais aussi une grande responsabilité car nous devons désormais œuvrer à propager ce modèle de dialogue dans la région en proie à la violence et au terrorisme. Le Nobel de la paix prouve que le dialogue est l’antidote de la violence et qu’il permet de surmonter tous les obstacles. Cette distinction valorise et consolide les institutions démocratiques. Nous sommes là pour servir de contre-pouvoir et œuvrer pour que la démocratie soit une réalité. Il y a encore beaucoup de chemin à parcourir mais ce Nobel nous encourage et nous donne un énorme souffle pour continuer.

Il encourage aussi toute la société civile tunisienne et va inciter les politiques et le gouvernement à être au niveau de cette distinction. Cela nous encourage aussi à lutter ensemble contre toute forme d’extrémisme avec une plus grande justice sociale et un message de tolérance.