La Russie cherche à se rapprocher de l'Occident au Proche-Orient mais sur le plan intérieur, les organisations occidentales continuent d'être considérées comme une menace pour le régime. Le parquet russe a ainsi décidé lundi de qualifier d'«indésirables» les Fondations Open Society (OSF) et autres associations affiliées, bannissant de fait toutes leurs activités en Russie. Il applique ainsi une loi «sur les organisations étrangères indésirables» car représentant une menace pour la sécurité du pays, adoptée en mai et entrée en vigueur début juillet. Toute association ainsi qualifiée voit ses bureaux fermés, ses fonds gelés et ses activités interdites. En cas d'infraction, son personnel, comme tout Russe acceptant de coopérer avec elle ou d'en recevoir des fonds, devient passible d'amendes ou de peines de prison pouvant aller jusqu'à six ans.
Créée en Russie par le milliardaire américain George Soros dans les années 90 pour aider à la construction d'une société postcommuniste, la fondation est depuis longtemps dans le collimateur des autorités russes, qui lui reprochent d'avoir financé les «révolutions de couleur» du début des années 2000 en Géorgie et en Ukraine. Moscou s'est également irrité des appels de Soros à sanctionner plus fermement la Russie pour son rôle dans la guerre qui déchire l'est de l'Ukraine depuis plus d'un an.
«Révolutions de couleur»
Open Society n'est pas la première ONG à faire les frais de la nouvelle législation. Dès la fin juillet, le parquet a ouvert une enquête contre douze associations, essentiellement américaines, dont le National Endowment for Democracy (NED), partiellement financé par le Congrès américain, l'International Republican Institute (IRI), proche des républicains américains, le National Democratic Institute (NDI), proche des démocrates et Freedom House, tous considérés par le Kremlin comme des acteurs de ces «révolutions de couleur» (rose, orange, ou autre). Premier à être puni, le NED est accusé par le ministère russe de la Justice «d'avoir dépensé des millions pour mettre en cause la légitimité des élections russes».
La loi sur les «organisations étrangères indésirables» était venue compléter une série de lois déjà destinées à étouffer toute contestation dans la société russe. La première d'entre elles, adoptée en 2012, est la loi «sur les agents de l'étranger», qui contraint les associations recevant des fonds de contributeurs étrangers à se déclarer comme «agent de l'étranger». Il s'agit d'une qualification stigmatisante, puisque cette formule était utilisée sous le communisme des années Brejnev pour disqualifier les «ennemis du peuple». Une centaine d'ONG en ont déjà pâti, dont Memorial, la plus connue, fondée par le prix Nobel de la paix Andreï Sakharov pour faire connaître la vérité sur les crimes du communisme.
Une série d'associations, dont Human Rights Watch, toujours présente en Russie, ont condamné les mesures prises contre Soros – dont l'ONG a distribué de très nombreuses bourses à des étudiants russes –, en accusant les autorités d'avoir pour but d'«étouffer tout débat» dans la société.