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Libération
EDITORIAL

Laboratoire

publié le 18 décembre 2015 à 18h56

Podemos et Ciudadanos, mouvements surgis de la société civile, réenchantent la politique espagnole, mais pas seulement. L’un à gauche, parti anti-austérité né des Indignados, l’autre au centre prônant le libéralisme et la justice sociale, ils inventent des formes de mobilisations citoyennes et marquent un renouvellement générationnel face aux deux grands partis, le Parti populaire (PP) et le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE), qui ont dominé le pays depuis la fin du franquisme. Ce scrutin annonce une transition démocratique au moins aussi importante que celle qui a suivi la mort de Franco, en 1975. L’Espagne est un vrai laboratoire politique. L’ampleur même de la crise de 2008 puis l’éclatement de la bulle immobilière avec un chômage qui touche plus d’un jeune sur deux expliquent la révolte contre la corruption, et l’arrogance de la «caste», au pouvoir. Le déni était impossible. La très sévère politique d’austérité menée par la droite n’a pas pour autant entraîné une percée de l’extrême droite, une explosion de haine xénophobe ou de poussée eurosceptique dans un pays qui continue de voir le projet communautaire comme une chance. Cela s’explique par la force du lien social, notamment de la famille, mais aussi par la conscience, aussi bien à droite qu’au centre ou à gauche, au sein des vieux partis comme dans ces nouveaux mouvements, de la nécessité de réformes structurelles pour remettre l’économie sur pied. Elles donnent leurs premiers résultats avec une croissance de plus de 3 % cette année, même si nombre des emplois créés sont précaires. Le révélateur espagnol est porteur de leçons à méditer. Nombre d’électeurs vont voter avec «ilusión», un hispanisme qui signifie non pas un rêve fumeux mais un mélange d’enthousiasme et d’optimisme.