Il y a dix jours, le Premier ministre indien, Narendra Modi, créait la surprise en rendant visite à son homologue pakistanais, Nawaz Sharif, au retour d’une visite en Afghanistan le jour de Noël. Un réchauffement entamé depuis six mois mais menacé par l’assaut d’une base aérienne indienne dans le Pendjab, dont les auteurs sont soupçonnés d’appartenir au groupe islamiste Jaish-e-Mohammed, basé au Pakistan. Dimanche, c’est un consulat indien en Afghanistan qui était attaqué par des hommes armés. Christophe Jaffrelot, directeur de recherche au CNRS, explique la logique de ce jeu à trois entre l’Inde, le Pakistan et l’Afghanistan.
Que représente pour les Indiens l’attaque de la base aérienne de Pathankot, qui a duré presque trois jours ?
C’est un choc. Qu’une base aérienne, très sécurisée, soit visée par les islamistes pakistanais, c’est une première.
Comment les islamistes ont-ils pu s’y infiltrer ?
Le soupçon porte sur des complicités à l’intérieur, dans un pays où il y a une hantise de voir l’armée infiltrée par les islamistes indiens.
Pourquoi cette attaque ?
Comme à chaque fois qu’il y a un rapprochement Inde-Pakistan dont les civils sont les architectes, l’objectif des militaires pakistanais est de faire dérailler le processus. Ils font agir leurs jihadistes, les groupes Jaish-e-Mohammed et Lashkar-e-Toiba.
Comment expliquer l’attaque du consulat indien à Mazar-i-Charif, en Afghanistan, dimanche ?
Les talibans, qui regagnent du terrain dans toutes les régions d'Afghanistan, ou peu s'en faut, sont en cheville avec les services secrets pakistanais depuis longtemps. Or, les militaires pakistanais veulent empêcher que l'Inde prenne position en Afghanistan. Ashraf Ghani, après avoir joué la carte pakistanaise, joue maintenant la carte indienne. Il y a dix jours, Narendra Modi [le Premier ministre indien, ndlr] a accepté de livrer des armes à l'Afghanistan, notamment trois hélicoptères d'attaque. Ce n'est pas un hasard si c'est en rentrant de Kaboul que Narendra Modi s'est arrêté à Lahore. Il s'agissait de rassurer le Pakistan, inquiet du rapprochement indo-afghan.