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Libération

«Tout d’un coup, j’ai vu une grande boule de feu»

L’attaque d’un kamikaze saoudien lié à l’Etat islamique, mardi dans le quartier stanbouliote de Sultanahmet, a fait au moins 10 morts, dont 9 touristes allemands.
publié le 12 janvier 2016 à 20h31

«Une bombe de l'Etat islamique a frappé le cœur du tourisme turc», résumait, mardi, une responsable du quotidien de gauche Cumhuriyet Gazetesi, en apprenant qu'un attentat-suicide venait de secouer le centre d'Istanbul. Ce n'est que trois heures plus tard que le Président, Recep Tayyip Erdogan, a fait connaître les premiers détails : «Le kamikaze est un ressortissant syrien. Dix personnes, dont des touristes étrangers, sont mortes, et 15 personnes ont été blessées.» La police a révélé un peu plus tard l'identité du kamikaze qui n'était pas syrien, mais saoudien. «Il s'agit de Nabil Fadli, né en Arabie Saoudite en septembre 1988.» Pour le gouvernement turc, le crime porte la signature de l'organisation terroriste Etat islamique, déjà responsable en octobre de l'attentat dans la capitale, Ankara, le plus meurtrier jamais commis dans le pays, avec 102 morts.

Jeu télévisé. L'attaque a eu lieu vers 10 h 20 juste à côté de l'obélisque, sur l'ancien hippodrome byzantin, entre l'église Sainte-Sophie et la Mosquée bleue, dans le quartier de Sultanahmet. «Tout d'un coup, j'ai vu une grande boule de feu et entendu une forte explosion du côté de l'obélisque au milieu d'un groupe de touristes», a témoigné un passant sur la chaîne d'information continue CNN Türk. Le cadreur de l'agence de presse Dogan précise : «Le groupe de touristes était réuni autour de l'obélisque en train d'écouter les explications du guide. Et un kamikaze, qui avait pris place dans le groupe, s'est fait exploser.» Cinquante-huit minutes exactement après l'explosion, l'office du Premier ministre par l'intermédiaire de la RTUK (le CSA turc) a annoncé «une interdiction provisoire de publication d'informations» sur l'attentat de Sultanahmet (lire aussi page 4). Pour préserver la «sécurité nationale et l'ordre public», selon le communiqué officiel.

«Toutes les victimes sont de nationalité étrangère», a affirmé le Premier ministre, Ahmet Davutoglu, qui a présenté ses condoléances à l'Allemagne, dont seraient originaires neuf touristes tués. Six autres Allemands, un Norvégien et un Péruvien ont été hospitalisés, a déclaré la préfecture. Deux des blessés sont dans un état grave, selon le ministre de la Santé. Le groupe de touristes allemands victimes de l'attentat participait à un jeu télévisé, la Chasse au trésor, d'après une source policière. La police a tout de suite encadré l'endroit de l'explosion, et des blindés des services de sécurité, des ambulances et des sapeurs-pompiers sont venus sur place. L'esplanade a été vidée.

A Ankara, le président de la République a condamné cet acte. «La Turquie est la cible de toutes les organisations terroristes. Nous ne faisons pas de distinction entre l'Etat islamique, le PKK [rébellion kurde de Turquie, ndlr], le PYD [Kurdes de Syrie], DHKP-C ou le MLKP [deux organisations de l'extrême gauche illégales turques]. La Turquie est le pays qui lutte de la façon la plus déterminée contre l'EI. Et nous poursuivons notre combat contre les terroristes séparatistes. Certaines personnes et certains pays ne comprennent toujours pas notre position», a-t-il déclaré. Tous les partis politiques ont, de leur côté, condamné l'attentat.

Rumeur. Le quartier touristique de Sultanahmet, sur la côte européenne de la ville, avait déjà été visé le 6 janvier. Une kamikaze avait fait exploser une bombe juste à côté d'un poste de police. Un policier avait été tué et deux civils blessés. L'identité de la jeune femme n'avait pas été révélée par la police, mais, selon la rumeur, il s'agissait soit d'une citoyenne tchétchène, soit d'une militante turque de l'extrême gauche.