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Libération
Corrido

L'arrestation de Chapo Guzmán en musique

Avec des dizaines de chansons à sa gloire postées sur Internet, le baron de la drogue continue d'inspirer les musiciens mexicains.

Le baron de la drogue El Chapo maintenu par des policiers peu après son arrestation, le 8 janvier 2016 sur le tarmac de l'aéroport de Mexico. (Photo Alfredo Estrella. AFP)
Publié le 14/01/2016 à 7h15

Comme à chaque épisode de la vie de Joaquín Guzmán Loera, alias El Chapo («le trapu»), des chansons ont été composées en son honneur dès les heures qui ont suivi sa recapture, le 8 janvier. C'est la fonction du «corrido» depuis la Révolution mexicaine, il y a un siècle : raconter l'actualité à ceux qui ne lisent pas le journal. Les corridos d'aujourd'hui décrivent l'immigration clandestine, dénoncent la corruption et surtout, font l'éloge des parrains de la drogue qu'ils présentent comme des bienfaiteurs. En juillet, les chansons célébraient la spectaculaire évasion d'El Chapo de la prison d'Altiplano en se moquant des autorités incapables de retenir l'homme le plus surveillé du pays. Ces derniers jours, c'est la compassion pour le «Seigneur des tunnels» qui inspire les auteurs. Florilège, parmi des centaines de vidéos.

Mario «Cachorro» Delgado, roots

Originaire comme El Chapo de l'Etat de Sinaloa, Mario Delgado alias El Cachorro (le chiot) chante un corrido très roots, accompagné par son protégé, le chanteur du groupe Nietos de Maria, «les petits-enfants de Marie». «Le Président a tweeté "Mexicains nous le tenons", et pour ma part j'ai pensé, que diable allons-nous faire ? Avec le chef à l'ombre, nous serons nombreux à ne plus manger.» Le propos peut choquer mais Mario Delgado n'a rien d'un artiste marginal : il a longtemps diffusé ses apologies des criminels (Guzmán et d'autres) sous l'étiquette de la multinationale Universal.

Bandachi, minimal

Etrange hybride minimaliste de banda (fanfare de cuivres) et de mariachi (orchestre de violons), le trio Bandachi, de l'Etat de Michoacán, chante : «Ils croient qu'en m'arrêtant, le trafic va s'arrêter, mais j'ai mes connexions et je peux opérer de l'intérieur. Les marchandises circuleront et tout roulera comme d'habitude.»

La Ventaja, nordiste

Sur un air d'accordéon norteño (du nord du Mexique), deux groupes réputés de Sinaloa, La Ventaja et Tamarindo Norteño, unissent leurs forces pour s'apitoyer sur leur compatriote détenu. «Dans la montagne, il n'y a que l'herbe qui rapporte de la thune. Chapo Guzmán nous l'achète et soulage nos souffrances. S'il n'est plus là, la tragédie nous guette. Si la nouvelle est vraie, les gens pleureront dans les montagnes.» La vidéo est spectaculaire mais semble avoir été tournée pour un autre titre.

 Virlan Garcia, folk

Un témoignage brut : Virlan García, de Tijuana, livre la première version de sa chanson inspirée par l'actualité, dont il a écrit les paroles sur son smartphone. Purement descriptif, son corrido raconte : «Ça ne pouvait être qu'un jour nuageux, en maillot de corps à bretelles, dans les égouts j'ai été coincé…» García est l'étoile montante du corrido d'auteur, dont le chef de file, Ariel Camacho, est mort en février, à 22 ans. Non pas lors d'un règlement de comptes comme de nombreux musiciens de la galaxie narco ces vingt dernières années, mais dans un accident de la route.