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Deux journalistes d’opposition turcs risquent la prison à vie

publié le 27 janvier 2016 à 20h11

C'est un avertissement à ce qui reste de presse libre en Turquie et à tous les intellectuels trop critiques, dans la ligne de mire du président islamo-conservateur, Recep Tayyip Erdogan. Deux mois après leur mise en détention pour un article accusant le régime d'avoir livré des armes aux islamistes syriens, un procureur d'Istanbul a encore aggravé les charges qui pèsent sur Can Dündar, rédacteur en chef de Cumhuriyet, et Erdem Gül, le patron du bureau d'Ankara de ce quotidien de gauche. Déjà poursuivis pour «espionnage» et «divulgation de secrets d'Etat», les hommes sont désormais aussi accusés de «tentative de coup d'Etat» et d'«assistance à une organisation terroriste». Le parquet de la plus grande ville de Turquie a en conséquence réclamé contre eux une peine de réclusion à perpétuité aggravée, la sanction la plus lourde prévue par le code pénal turc, dans son réquisitoire de 473 pages. Dündar et Gül ont été incarcérés et inculpés pour avoir diffusé des photos et une vidéo de l'interception à la frontière syrienne, en janvier 2014, de camions appartenant aux services secrets turcs (MIT) et transportant des armes.

Le chef de l'Etat, qui a personnellement porté plainte contre les deux journalistes, de même que le chef du MIT, Hakan Fidan, avait dénoncé une «trahison» et promis à la télévision que ses auteurs allaient en payer «le prix fort». Leur incarcération a suscité un tollé en Turquie, comme à l'étranger, et relancé les accusations de dérive autoritaire portées contre Erdogan, au pouvoir depuis 2003.