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Analyse

Pétrole : en pleine guerre des cours, l’Arabie Saoudite fait un petit geste

Publié le 16/02/2016 à 21h21

Persuadés que les cours se maintiendraient de longues années à un niveau élevé, les marchés financiers, les compagnies pétrolières et les banques qui ont financé le secteur espéraient une baisse de la production mondiale d’or noir. Las. Mardi, l’Arabie Saoudite et la Russie, deux grands exportateurs, n’ont annoncé qu’un simple gel de leur production à l’issue d’une réunion à Doha avec le Qatar et le Venezuela. Et encore, à la condition que les grands payspétroliers acceptent, eux aussi, de maintenir leur offre au niveau de janvier.

Pour le ministre qatari de l’Energie, Mohammad bin Saleh al-Sada, cette mesure devrait néanmoins permettre de stabiliser le marché pétrolier, qui fait face à un net déséquilibre entre l’offre et la demande. Chaque jour, les pays producteurs proposent 95 millions de barils au niveau mondial, soit entre 1 et 2 millions de barils en trop. Un excédent qui n’en finit pas de déprimer les prix : ils se sont effondrés de près de 75 % en dix-huit mois, passant de 114 dollars le baril (102 euros) à environ 33 dollars mardi.

«Il est difficile de saisir la cohérence de ces pays, analyse Philippe Chalmin, économiste à Paris-Dauphine. L'Arabie Saoudite, menacée par les pétroles de schiste américains et canadiens, s'est lancée dans une guerre des prix. Or, au moment où ça commence à faire mal aux Etats-Unis, elle semble faire marche arrière. Ou plutôt, elle veut faire croire qu'elle change de cap.»

Il est vrai que le secteur américain de l’énergie souffre : près de 60 % des capacités ont fermé en un an. Au chapitre des chiffres vertigineux, il y a aussi la capitalisation boursière de l’ensemble des plus grands groupes mondiaux du secteur pétrole et gaz, qui ont abandonné quelque 750 milliards de dollars depuis fin 2014.

Bien sûr, une baisse des cours de l’or noir fait (en théorie) le bonheur des importateurs qui voient diminuer leur facture énergétique. De quoi gagner (toujours en théorie), un soupçon de croissance supplémentaire. Mais pour les marchés, les perdants sont plus nombreux que les gagnants. Résultat : les Bourses paniquent. Certains estiment que les banques ne cessent de voir le montant de leurs créances douteuses augmenter à mesure que s’effondrent les cours du pétrole, et qu’il faut donc vendre les actions des grandes banques engagées (via le crédit) dans un secteur pétrolier de moins en moins rentable.