Aucune majorité claire ne se dessinait dimanche soir en Irlande alors que seuls les deux tiers du nouveau Dail (la Chambre basse, 166 sièges) étaient connus. On peut d’ores et déjà tirer des leçons de ses résultats partiels.
1-Austérité
En Grèce, au Portugal ou en Espagne, les électeurs ont renvoyé les gouvernements qui ont appliqué, souvent avec zèle, les saignées imposées par la troïka (Commission européenne, FMI, BCE). C'est le cas de la coalition entre le Fine Gael (centre droit) et le Labour, en chute libre après avoir connu, en 2011, la plus grande majorité de l'histoire de la République.
2-Promesses
La coalition au pouvoir, le Fine Gail et le Labour, ont promis beaucoup de larmes, tout en garantissant que certains services publics seraient préservés. Ils ont tenu la première partie de leurs promesses, dont la multiplication des taxes. Ils ont mis un mouchoir sur d'autres, comme celle, que paie très cher le Labour, de ne pas augmenter les frais d'inscriptions des universités, finalement multipliés par deux. Ils ont délaissé le logement, qui connaît une crise sans précédent.
3-Redistribution
La croissance et la lutte contre le chômage ne suffisent pas. Il importe aussi que la redistribution, la lutte contre la pauvreté et les inégalités se traduisent dans les faits. Le Taoiseach (le Premier ministre), Enda Kenny, a pu se targuer d'avoir remis l'économie sur les rails (6,9 % de croissance en 2015), divisé quasiment par deux le chômage (8,6 % en janvier contre 15 % cinq ans plus tôt), il n'a cessé de se voir reprocher la violence des coupes claires dans les services publics, et la baisse des salaires des fonctionnaires.
Il devrait certes arriver en tête, avec environ 26 % des voix. Mais, à l’arrivée, il est improbable qu’il s’allie avec le Fianna Fail (également de centre droit), son frère ennemi historique.
4-Nouveauté
Plus que jamais, le triomphe des indépendants, dont beaucoup ont fait campagne contre l’austérité, illustre le désamour pour les partis traditionnels. Un exemple parmi d’autres : celui de Michael Harty, 63 ans. Ce médecin a décidé il y a trois semaines d’entrer en politique pour dénoncer l’abandon des services de bases dans les campagnes, à commencer par la santé (préoccupation numéro 1 des Irlandais). Nous l’avions suivi dans sa circonscription de Clare, au nord-est de Limerick, dans une région emblématique de la désertion de l’Etat-providence. Il a été l’un des premiers candidats élus haut la main.