Le niveau des attaques de Donald Trump contre ses concurrents républicains ne semble pas près de s'élever. Marco Rubio «a parlé de mes mains en sous-entendant que si elles étaient petites, autre chose devait être petit. Je vous garantis qu'il n'y a aucun problème», a rétorqué, jeudi, le magnat de l'immobilier, lors d'un débat entre les quatre derniers prétendants à l'investiture du parti. Son rival modéré avait, il est vrai, tendu le bâton pour se faire battre en ironisant, dimanche dans un meeting, sur la taille des mains du milliardaire.
Cataclysme. Mais au-delà de ces échanges indélicats, le Parti républicain est au bord de l'implosion. L'électrochoc du Super Tuesday, lors duquel Trump a remporté sept primaires sur onze, a déclenché un cataclysme. «Bienvenue dans la guerre civile», titre le site Politico. Dans les primaires, le «super mardi» permet souvent d'amorcer le rassemblement autour du mieux placé pour se focaliser sur le camp adverse.
Toutefois, 2016 n'a rien d'une élection traditionnelle. Horrifiés par la perspective de voir Trump remporter l'investiture, plusieurs élus conservateurs ont sonné la charge jeudi, à commencer par les deux anciens candidats à la présidence, John McCain (2008) et Mitt Romney (2012). «Donald Trump est un imposteur, un escroc. Il prend les Américains pour des pigeons», a déclaré ce dernier. «Sa politique intérieure nous conduirait à la récession. Sa politique étrangère rendrait l'Amérique et le monde moins sûrs», a martelé McCain. «Il n'y a probablement jamais eu un tel niveau d'invective personnelle de la part d'un ancien nominé républicain envers le favori», a confié au New York Times David Greenberg, historien à la Rutgers University.
Fidèle à son style outrancier, Trump a répliqué par une blague graveleuse. «J'ai soutenu Mitt Romney en 2012. Il m'a supplié pour obtenir mon soutien. J'aurais pu lui dire, "Mitt, mets-toi à genoux", et il se serait agenouillé», a-t-il lancé. A l'issue du onzième débat télévisé républicain, le milliardaire s'est moqué de la défaite de Mitt Romney face à Barack Obama en 2012 : «Il nous a vraiment laissé tomber il y a quatre ans. Il aurait dû gagner cette élection.»
De l'avis des observateurs, l'attaque en règle lancée par Romney illustre une fracture irréparable au sein du parti. Mercredi, près d'une centaine de responsables républicains ont publié une lettre ouverte, promettant de ne jamais le soutenir. En cas de victoire du milliardaire à la primaire, certains n'hésitent plus à pronostiquer un schisme au sein du parti. «Si Trump est le nominé, un conservateur de l'establishment se présentera. Si, à l'inverse, il se fait écarter par le parti, il se présentera en indépendant», estime Matt Dowd, un ex-conseiller de George W. Bush.
Fort de ses victoires dans dix des quinze premiers scrutins, Trump n'a pas grand-chose à craindre de Romney. Au contraire : les attaques pourraient renforcer sa candidature. Quoi de mieux, en effet que d'être la cible des candidats battus par Obama ? «Cela aide Trump quand l'establishment s'acharne sur lui», a réagi une porte-parole de sa campagne.
Putsch. Outre la révolte républicaine, le milliardaire a dû faire face jeudi soir à ses adversaires à la télévision.Souvent incapable de répondre à la question posée, Trump a vanté sa «flexibilité». Interrogés par les journalistes de Fox News, les trois rivaux de Trump se sont engagés à le soutenir s'il obtenait l'investiture.
Des rumeurs prêtent toutefois à l’état-major républicain la volonté d’organiser un putsch pour l’écarter lors de la convention de Cleveland en juillet, dans l’hypothèse où il n’aurait pas obtenu la majorité des délégués. Beau joueur, Trump a promis de ne pas se présenter en indépendant. Un point sur lequel il a souvent donné des réponses contradictoires. On est flexible ou on ne l’est pas.