Le bilan de l'attentat à la voiture piégée en Turquie s'est alourdi lundi. L'explosion a tué au moins 36 personnes et blessé 125 autres, dont 19 sont dans un état grave, selon un bilan officiel. Peu après l'attentat, le gouverneur d'Ankara a expliqué qu'il s'agissait «d'une voiture qui a explosé entre deux autobus à Kizilay», un quartier commerçant au cœur de la capitale, où se dressent de nombreux bâtiments officiels. Quarante minutes après l'explosion, le Haut Conseil audiovisuel turc a décrété une interdiction de diffusion des images, des sons et des informations sur «le moment de l'explosion et sur les cadavres», alors que les médias ne parlaient encore que des blessés à cette heure. Un tribunal de Golbasi (district d'Ankara) a aussi décidé vers 20 heures d'interdire deux réseaux sociaux, «pour empêcher la désinformation».
C’est le troisième attentat majeur en six mois ciblant Ankara, déjà ensanglanté le 10 octobre par une double attaque kamikaze visant un cortège de la gauche et des Kurdes, commis par l’Etat islamique (EI). Le modus operandi de l’attaque de dimanche est ici identique à celui qui avait visé, le 17 février, deux bus de l’armée, faisant 28 morts. Selon les autorités, l’attentat avait été commis par un membre du Parti de l’union démocratique des Kurdes de Syrie, considéré par le pouvoir comme organiquement lié au Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), qui mène depuis 1984 contre Ankar une lutte armée qui a fait 40 000 morts. Le même jour, les Faucons de la liberté du Kurdistan (TAK), organisation armée issue du PKK, avait revendiqué l’attentat.
Lundi matin, les autorités ont affirmé que le massacre de dimanche avait été perpétré par une jeune militante du PKK. La police turque a d’ailleurs arrêté 11 personnes. Entre 4 et 6 l’ont été dans la ville kurde de Sanliurfa (sud-est), a rapporté l’agence de presse progouvernementale Anatolie. La police a procédé à ce coup de filet sur la foi d’une information indiquant que le véhicule utilisé dans l’attaque avait été acheté dans cette ville, toujours selon l’agence. Les commentateurs soulignent que l’organisation s’est lancée dans une fuite en avant après l’échec des insurrections lancées ces derniers mois dans plusieurs villes du sud-est de la Turquie, peuplé en majorité de Kurdes.
D'autres observateurs ont pourtant des doutes, comme Nihat Ali Ozcan, du quotidien progouvernemental Milliyet, qui souligne que «le PKK ou le TAK ont préféré jusqu'à maintenant des cibles militaires» et évoque l'hypothèse d'une action de l'EI. «Notre Etat ne renoncera jamais à faire usage de son droit à la légitime défense contre toute menace terroriste», a déclaré le président islamo-conservateur, Recep Tayyip Erdogan, précisant que «la lutte contre le terrorisme va se poursuivre avec plus de détermination».
L’aviation turque a ainsi bombardé lundi à l’aube des camps du PKK situés dans le nord de l’Irak, et mené une série de frappes contre plusieurs bases des rebelles kurdes dans les montagnes de l’extrême nord irakien, vers Kandil et Gara, a annoncé l’état-major.