Les centaines de réfugiés qui avaient réussi à franchir à pied ce lundi par des chemins détournés la frontière gréco-macédonienne, fermée début mars, ont été interceptés par l’armée macédonienne et seront renvoyés à Idomeni, cette petite bourgade grecque où s’entassent déjà plus de 12 000 déplacés des guerres en Syrie, Irak ou Afghanistan. Car, comme la Grèce, la Macédoine n’entend pas que s’installent chez elle ces migrants qui, depuis l’été, arrivent en un flot continu sur la route des Balkans avec une seule idée en tête : gagner l’Allemagne ou la Suède.
A lire aussi : Le calvaire des mineurs migrants échoués en Grèce
La crise migratoire n'a fait qu'accroître les tensions entre pays voisins et le ressentiment des pays les pauvres contre les plus riches en Europe. Le président macédonien, Gjorge Ivanov, n'a pas caché son amertume dans un entretien vendredi au quotidien allemand Bild : «Ce n'est pas la première fois que la Macédoine est abandonnée par l'Union européenne, nous avons déjà connu cela lors de la crise du Kosovo. Nous avons déjà dépensé 25 millions d'euros – de l'argent de nos contribuables – et déclaré l'état d'urgence. Qu'avons-nous obtenu de l'Europe ? Rien ! Pas un centime ! Et à présent, alors que notre pays n'est pas membre de l'UE, nous devons protéger les frontières de l'Europe, face à des gens en provenance d'un pays membre, à savoir la Grèce.»
Ces derniers mois, les obstacles se sont dressés entre tous les pays de l'ancienne route des Balkans, ceux-là mêmes qui, l'été dernier, avaient adopté une stratégie identique : faire que le transit de ces populations de réfugiés sur leur territoire se réalise sans entrave et le plus rapidement possible. La Hongrie, dirigée par le très autoritaire Viktor Orbán, avait été la première, dès juillet-aôut, à dresser une frontière de barbelés pour empêcher le passage de ces foules. Elle a depuis été suivie par l'Autriche, la Slovénie, la Croatie, la Serbie et la Macédoine. «L'UE a vendu son âme à Orbán», concluait dimanche EUinside, un média bulgare en ligne consacré aux questions européennes, en critiquant notamment le projet de l'UE de s'arranger avec la Turquie, moyennant compensations financières, pour endiguer le flot de nouveaux arrivants en Europe.
«L’Allemagne en profite»
Sans renoncer à sa philosophie de l'ouverture, la chancelière allemande, Angela Merkel, a reconnu lundi que la multiplication des murs profitait à l'Allemagne, où l'arrivée des réfugiés se ralentit alors qu'une partie de la population souhaite une pause dans l'accueil des personnes déplacées, comme on l'a vu ce week-end dans les urnes. «Il est incontestable que l'Allemagne en profite [mais aussi] que cette solution n'est pas durable, on le voit tous les jours aux images provenant de Grèce», a-t-elle relevé.
Ouverte sur la mer, la Grèce voit s’accumuler les migrants qui ne se découragent pas facilement. Les 12 000 bloqués à Idomeni vivent dans des conditions très difficiles, dans des tentes de fortune plantées dans la boue. Les crues qui ont gonflé les cours d’eau ont provoqué lundi la mort de trois personnes qui avaient tenté de traverser une rivière à la frontière gréco-macédonienne pour poursuivre leur route. Ces trois personnes, dont deux sœurs, parmi lesquelles une mineure et une femme enceinte, faisaient partie d’un groupe de 19 Afghans partis tenter leur chance. Les rescapés ont été accueillis en Macédoine dans un centre situé à Gevgelija.