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Libération

Le Haut Commissariat aux réfugiés de l’ONU s’oppose aux «centres de détention» grecs

publié le 22 mars 2016 à 19h21

Comme il fallait s'y attendre, l'accord passé vendredi entre l'Union européenne et Ankara pour renvoyer automatiquement en Turquie les migrants arrivant en Grèce s'avère difficile à mettre en place. Mardi, le Haut Commissariat de l'ONU pour les réfugiés (HCR) a exprimé ses réticences. Les «hot spots» - ces centres d'accueil et d'enregistrement où doivent être dirigés les migrants - étant devenus des «centres de détention», l'organisme n'y transfère plus les réfugiés : «Conformément à notre politique qui s'oppose à la détention obligatoire, nous avons suspendu certaines de nos activités.»

Sa porte-parole, Melissa Fleming, a expliqué mardi à Genève : «Le HCR s'inquiète du fait que l'accord [soit] appliqué avant que les Grecs aient mis en place les protections nécessaires.» Depuis dimanche soir, les migrants passés par la Turquie, «pays sûr», doivent y retourner pour formuler leur demande d'asile. En théorie, leur renvoi s'effectue après une évaluation brève de chaque situation : pour agir rapidement, les Grecs jugent «irrecevable» la demande. Une possibilité d'appel existe, mais elle doit être examinée sur place, dans l'urgence.

Très douteux au regard du droit, ce tour de passe-passe se heurte au fait que la Grèce n'a pas, «à l'heure actuelle, une capacité suffisante sur les îles» pour évaluer les demandes, «ni les conditions adéquates pour accueillir les gens décemment» pendant l'examen de leur cas. Ce qui coince, surtout, c'est que l'expulsion de personnes ayant droit à l'asile s'avère contraire aux principes de base de l'ONU. Jusqu'ici, les Grecs se contentaient de les enregistrer et de leur délivrer un sauf-conduit.

«L'incertitude pour les arrivants crée beaucoup de nervosité», explique Fleming. La police distribue des tracts en persan et en arabe invitant les migrants à rejoindre les camps prévus, qui sont désormais pleins. Leur capacité doit être portée de 6 000 à 20 000 places. Près de 12 000 migrants, dont 4 000 enfants, campent toujours dans des conditions infâmes à Idomeni, à la frontière macédonienne, fermée depuis le 7 mars. Ce mardi, un homme a tenté de s'y immoler et s'est légèrement blessé. Et l'Europe, qui s'était engagée cet été à relocaliser 160 000 personnes, traîne des pieds : selon le HCR, à la date de lundi, 22 pays avaient proposé 7 015 places, mais seuls 953 demandeurs d'asile avaient été relocalisés (384 venant d'Italie et 569 de Grèce).