
Laachraoui, 24 ans, est l’homme à gauche sur la capture de la vidéosurveillance diffusée par les autorités belges, qui montre les trois auteurs présumés des attaques poussant des chariots à bagages dans le hall de l’aéroport de Bruxelles. Désormais, seul l’homme de droite, au visage masqué par un chapeau noir et des lunettes, n’est pas identifié.
«Parcours». Né le 18 mai 1991 au Maroc, de nationalité belge, Najim Laachraoui a grandi à Schaerbeek, une commune populaire du nord de Bruxelles. De 12 à 18 ans, pour ses études secondaires, il est scolarisé à l'Institut de la Sainte-Famille, une école d'enseignement libre catholique du quartier Helmet, dans le nord de Schaerbeek. Une bâtisse imposante, entourée de murs en brique rouge. «Il a eu un parcours tout à fait classique : il était en filière générale, n'a jamais redoublé, et il n'y a rien dans son dossier disciplinaire», affirme Veronica Pellegrini, directrice de l'école qui compte aujourd'hui 630 élèves, «surtout des jeunes du quartier», et dispense des «cours de religion catholique». «C'est une école multiculturelle, avec beaucoup de nationalités différentes», précise la directrice. Le jeune homme apparemment sans histoires - «un élève très correct», dit seulement une enseignante - conclut son cursus dans l'établissement le 30 juin 2009 et entame des études d'électromécanique. En 2012, il obtient son année avec mention «satisfaction», selon une revue d'anciens élèves… Puis interrompt ses études en février 2013, pour faire le jihad en Syrie, où il prend comme nom de guerre Abou Idriss. Fiché sur la liste de l'Organe de coordination pour l'analyse de la menace (Ocam), il est radié du domicile familial par la commune de Schaerbeek en février 2015. «Une simple procédure administrative, quand on réalise que la personne ne réside plus là», précise Marc Weber, le directeur de cabinet du bourgmestre de Schaerbeek.
Ses parents, ses frères et sa sœur, eux, vivent toujours dans le quartier de Terdelt. «Un chouette quartier bourgeois-bohème, ça ressemble à des cottages anglais», décrit Marc Weber. Selon lui, Najim était l'aîné de la fratrie, qui compte notamment Mourad Laachraoui, une figure du taekwondo. Dans les compétitions officielles, il représente la Belgique dans la catégorie des moins de 54 kilos.
ADN. Les rares photos montrent un jeune homme brun et souriant, arborant une barbichette. Son portrait figure dans plusieurs albums photos de dossiers d'instruction sur des réseaux jihadistes. Laachraoui était poursuivi dans une affaire de recrutement de volontaires pour la Syrie. Il y a quelques jours, le procureur avait requis par contumace quinze ans de prison à son encontre, principalement pour avoir amené plusieurs de ses amis dans les rangs de l'Etat islamique. Ignorant sa véritable identité, la justice belge et française le connaissait sous le nom de Soufiane Kayal, un acteur clé des attentats de Paris, resté mystérieux pendant des mois. Le parquet fédéral a dévoilé la veille des attentats de Bruxelles, et trois jours après l'arrestation de Salah Abdeslam, que Laachraoui utilisait ce pseudonyme.
Avec Mohamed Belkaïd (un Algérien de 35 ans abattu par la police à Forest, la semaine dernière), il est l’un des coordinateurs à distance des attaques du 13 Novembre. Le soir des attaques de Paris, le duo «Kayal»-Belkaïd correspond par téléphone avec les assaillants. Le rôle de Laachraoui ne se limiterait pas à la coordination : il serait également l’un des artificiers des attaques dans la capitale française. Son ADN a été retrouvé sur plusieurs ceintures d’explosifs, mais aussi dans au moins deux planques des terroristes : la maison louée à Auvelais, près de Namur, où plusieurs membres des commandos sont passés la veille des attentats, et dans l’appartement de la rue Henri-Bergé à Schaerbeek, qui a servi à préparer les explosifs et à cacher Salah Abdeslam à partir du 14 novembre.
Deux mois avant les attentats de Paris, le 9 septembre, Laachraoui avait été contrôlé en compagnie d’Abdeslam et de Belkaïd à bord d’une Mercedes, à la frontière austro-hongroise. Des trois, seul Abdeslam est encore en vie, et entre les mains de la justice.