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Libération
Terrorisme

Etat islamique en Malaisie : coup de filet et exploitation politique

La police a arrêté quinze personnes qui, selon elle, se préparaient à «lancer une attaque» dans le pays. L'Asie du Sud-Est reste une région hautement à risque.
L'ex-Premier ministre Najib Razak, en février 2016. Il a été chassé du pouvoir par les urnes le 9 mai 2018. (Photo Mandel Ngan. AFP)
publié le 25 mars 2016 à 12h07

La police malaisienne a annoncé, jeudi soir, l’arrestation de quinze personnes suspectées d’entretenir des liens avec l’organisation Etat islamique et de préparer un attentat. Les onze hommes et quatre femmes ont été appréhendés entre mardi et mercredi dans six des treize Etats de ce pays musulman. Parmi ces suspects âgés de 22 à 49 ans, les autorités malaisiennes disent détenir un fonctionnaire de police, un imam, un technicien aéronautique, un étudiant et une femme au foyer.

Ils sont suspectés d'avoir collecté de l'argent pour des actions terroristes, tenté d'assembler des éléments pour fabriquer des bombes et aidé deux activistes étrangers à fuir la Malaisie pour un autre pays de l'Asie du Sud-Est. «Tous les suspects recevaient des instructions de Muhamad Wandy Mohamed Jedi afin de lancer une attaque en Malaisie», a indiqué Khalid Abu Bakar, le chef de la police malaisienne, dans un communiqué jeudi soir. Wandy Mohamed Jedi est un Malaisien, membre de l'Etat islamique, qui se trouverait actuellement en Syrie.

Attentat de Jakarta en janvier

Après l'attentat de Bruxelles et celui, géographiquement plus proche de Jakarta (Indonésie) en janvier, Khalid Abu Bakar a insisté pour dire que la menace de l'EI dans la fédération malaisienne était réelle et avérée. Il a annoncé que la police allait se réorganiser et créer des divisions antiterroristes dans chacun des treize Etats. Quelques heures plus tôt, le ministre de l'Intérieur Ahmad Zahid Hamidi avait précisé devant le Parlement que 162 personnes liées à l'Etat islamique avaient été arrêtées depuis mai 2014. Les autorités disent avoir détecté huit groupes de militants menant des enseignements islamiques «déviants» et pris des mesures à l'encontre de six d'entre eux. Elles sont parvenues à identifier 46 Malaisiens qui seraient partis combattre dans les rangs de l'organisation. D'autres (dix-huit personnes) auraient été tués lors de combats en Irak et en Syrie, dont six qui se seraient fait exploser.

Après l’attaque de Jakarta, qui avait fait sept morts et une vingtaine de blessés, Kuala Lumpur avait arrêté sept personnes. Selon l’agence de presse Reuters, elles appartenaient à la même cellule terroriste au sein de laquelle opérait un certain Bahrun Naim, un Indonésien présenté comme le cerveau de l’attaque.

Colossal scandale

Les autorités malaisiennes, au plus haut niveau, n'ont cessé d'alerter sur la menace terroriste, au risque d'être prises en flagrant délit d'exploiter le danger posé par l'EI. Englué dans un colossal scandale de corruption qui pourrait bien coûter son siège au Premier ministre Najib Razak, le gouvernement semble chercher à allumer des contre-feux pour faire diversion. Début mars, le ministre de l'Intérieur Ahmad Zahid Hamidi avait évoqué les tentatives de kidnapping, en 2015, du Premier ministre, du ministre de l'Intérieur et de celui de la Défense par l'Etat islamique. Rien de moins. Un complot déjoué mais très ambitieux qui avait fait douter, voire ricaner les réseaux sociaux.

Ça ne veut pas dire que l'EI n'a pas les moyens de frapper en Asie du Sud-est. Début mars, un consultant politique cité par CNBC, Alastair Newton, indiquait que la menace terroriste ne pouvait être prise à la légère. «Il est loin d'être [facile de savoir] où, en dehors de son fief, l'Etat islamique frappera ensuite. Mais il frappera. Et l'Asie du Sud-Est est une région hautement à risque.»