A l’est comme à l’ouest du Mur, tout le monde connaissait ses grosses lunettes, le pull jaune canari – la couleur de son parti, le Parti Libéral FDP – qu’il portait invariablement, et son air de chien battu… Peu charismatique, Hans-Dietrich Genscher, chef de la diplomatie allemande sous diverses majorités de 1974 à 1992, a été l’un politiciens allemands les plus populaires depuis la Seconde Guerre mondiale.
Première brèche dans le rideau de fer
Son heure de gloire remonte au 30 juin 1989. Le ministre s’adresse depuis le balcon de l’ambassade de RFA (République fédérale d'Allemagne) à Prague à quelques milliers de réfugiés Est-allemands, qui ont fui leur pays pour rejoindre l’Ouest. Genscher leur annonce qu’ils pourront bientôt se rendre en RFA. C’est la première brèche dans le rideau de fer. Un an plus tard, c’est lui encore qui signe avec l’Union soviétique et les trois puissances occidentales (Etats-Unis, France et Grande-Bretagne) qui occupaient encore la RFA, le traité dit «2+4» qui annonce la Réunification.
Hans-Dietrich Genscher est né à Halle, en ex-RDA, en 1927. A la fin de la guerre, il est fait prisonnier par les Américains. A sa libération au début des années 50, atteint de tuberculose, il passe à l’Ouest. Avocat de formation, il rejoint les rangs du parti Libéral FDP en 1952. Le FDP, aujourd’hui moribond, est alors l’indispensable partenaire des coalitions ouest-allemandes. Genscher a été député du Bundestag sans interruption de 1965 à 1998.
Refus de diaboliser l'ennemi soviétique
Tout au long des dix-huit années qu’il a passé à la tête du ministère des Affaires Etrangères, Hans-Dietrich Genscher s’est évertué à mettre en œuvre une politique de rapprochement avec l’Europe de l’est communiste, refusant de diaboliser l’ennemi soviétique. Son objectif : la fin de la guerre froide et de la course aux armements.
Hans-Dietrich Genscher a très tôt reconnu la chance que représentait pour l’Allemagne l’arrivée de Mikhaïl Gorbatchev à la tête de l’Union soviétique.
Il se propose comme otage aux JO de Munich
La pire heure de sa carrière a été l’échec de la libération des athlètes israéliens pris en otages par un commando palestinien lors des JO de Munich en 1972. Genscher, alors ministre de l’Intérieur de Willy Brandt (SPD), se propose comme otage en échange des Israéliens. L’intervention des forces de l’ordre, désastreuse, s’achève par la mort de plusieurs otages. Genscher est à deux doigts de devoir démissionner.
Malgré sa démission surprise à l’âge de 65 ans en 1992, Hans-Dietrich Genscher était resté présent dans le débat politique allemand. Et parfois même actif, comme lors de la libération de Mikhaïl Khodorkovski, en décembre 2013. A l’automne 2014, il était retourné avec une douzaine d’anciens réfugiés à Prague, dans les murs de l’ambassade d’Allemagne, pour y fêter les 25 ans de la chute du Mur.