Vous n'avez pas tout suivi, voire rien du tout, des courses à l'investiture républicaine et démocrate ces derniers temps ? Tous les vendredis, Libération fait le point sur la campagne.
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La course
Les outsiders revigorés par le Wisconsin
Mardi dernier, les citoyens du Wisconsin, qu'ils soient démocrates ou républicains, étaient appelés aux urnes. Et ils ont privilégié les «outsiders», relançant —un peu— les courses aux investitures. Dans les rangs démocrates, Bernie Sanders a confirmé sa bonne dynamique du moment en devançant assez largement Hillary Clinton (48 délégués à 38), même s'il reste à bonne distance au décompte total. La surprise a été un peu plus grande chez les républicains puisque Donald Trump s'est assez lourdement incliné (35,1%) face à Ted Cruz (48,3%), alors qu'il s'était imposé dans les Etats voisins du Michigan et de l'Illinois, à la sociologie électorale comparable. Le sénateur du Texas a ainsi obtenu 36 délégués (contre six pour le milliardaire), ce qui le laisse néanmoins assez loin, encore, dans la course à l'investiture républicaine…
Up
Vers une convention républicaine «contestée» ?
Déjà dans l'air au moment de l'abandon de Marco Rubio, il y a un mois, la perspective d'une convention républicaine «contestée» se précise à mesure que les scrutins se succèdent. Mi-juillet, les délégués nationaux élus lors de ces primaires se réuniront en effet à Cleveland pour désigner officiellement le candidat républicain à l'élection présidentielle. Si, d'ici-là, Donald Trump en a remporté la majorité absolue, c'est-à-dire 1 237, l'affaire sera entendue. Mais, dans le cas contraire, la convention pourrait tourner à la foire d'empoigne. Or, en remportant le Wisconsin, Ted Cruz a éloigné Trump de cet objectif. Le milliardaire en compte à ce jour 757 : il lui en manque donc 480, alors qu'il n'en reste plus que 769 à glaner dans seize Etats…
Lors de la convention de juillet, tous les délégués ou presque (95%) devront en effet d'abord voter pour le candidat au nom duquel ils ont été élus dans leur Etat. Mais si aucun n'obtient alors la majorité abolue au premier tour de scrutin, les mandats impératifs des délégués tomberont progressivement : dès le deuxième tour, 60% seront libres de leur vote, et 80% au troisième tour. L'heure sera alors aux tractations, chacun essayant de faire émerger une candidature de consensus, capable d'obtenir une majorité absolue. Un scénario plus vu depuis des décennies et qui peut aller jusqu'à la désignation d'un candidat… qui n'était pas en lice aux primaires!
«Cette soirée est un tournant»
, s’est enflammé Ted Cruz après son succès dans le Wisconsin.
Down
Quand Hillary Clinton manque d’élégance, Bernie Sanders perd sa bonne foi
Face à la percée de son concurrent Bernie Sanders, l’ancienne sénatrice de New York et ex-Madame diplomatie du gouvernement Obama,
[ a du mal à contenir son agacement ]
. Alors que, jusqu’ici, la bataille entre les deux démocrates restait somme toute correcte et polie, Hillary Clinton s’est interrogée mercredi sur la capacité de Bernie Sanders à exercer la fonction de président des Etats-Unis.
«Je pense qu’il n’a pas fait ses devoirs et que depuis plus d’un an il parle de faire des choses qu’il n’a à l’évidence pas vraiment étudiées ou comprises»,
a élégament déclaré Hillary Clinton
[ dans une interview à MSNBC ]
.
Une déclaration que le camp Sanders s'est empressé de réinterpréter. Le sénateur du Vermont a prétendu qu'Hillary Clinton l'avait jugé «pas compétent» pour le job… et a répliqué lors d'un meeting : «Quand vous [Hillary Clinton, ndlr] avez voté pour la guerre en Irak, la boulette la plus désastreuse de l'histoire américaine en matière de politique étrangère, vous pourriez vouloir interroger vos [propres] compétences. Quand vous avez voté pour des accords commerciaux qui ont coûté à des millions d'Américains des emplois correctement rémunérés, le peuple américain pourrait avoir envie d'interroger vos compétences. Quand vous dépensez énormément de temps à lever des fonds pour votre Super PAC de la part des personnes les plus riches de ce pays, et qui ont les plus ahurissants intérêts particuliers… Etes-vous qualifiée pour être la présidente des Etats-Unis quand vous levez des millions de dollars de Wall Street dont la cupidité et l'imprudence ont contribué à détruire notre économie ?» Bien envoyé, même si l'argument de départ est faux.
La phrase
Les primaires sont interminables pour Ben Carson. Il y a un an, ce neurochirurgien à la retraite était l'un des favoris pour l'investiture républicaine, au coude-à-coude avec Donald Trump dans les sondages. Depuis, c'est la débandade. Sans doute en partie plombé par son impressionnant débit d'inepties, Carson s'est rapidement essoufflé et, après de calamiteux premiers scrutins, il a fini par jeter l'éponge début mars, avant d'annoncer son soutien à Donald Trump. Mais il n'est pas franchement meilleur dans le rôle du lieutenant. Interrogé par des journalistes de CNN sur l'affaire Corey Lewandowski —le directeur de campagne de Donald Trump, inculpé pour coups et blessures contre une journaliste— Carson a d'abord botté en touche, sur fond de présomption d'innocence, avant de suggérer que son intervieweur, John Berman, avait «sans doute été inculpé un jour [lui] aussi». Passé l'étonnement (partagé avec une consœur), ce dernier a rapidement nié avoir jamais été inculpé. Ce faux pas de Carson dans la campagne de Trump n'est pas le premier : le Huffington Post américain s'est amusé à recenser toutes les fois où le neurochirurgien n'a pas franchement fait le job pour le milliardaire. Comme lorsqu'il a estimé que si Trump s'avérait être un mauvais président, après tout, cela ne durerait que quatre ans…
Le chiffre
188
En mètres, c'est la hauteur de la tour Trump située à Vancouver, au Canada. Face au discours de haine du candidat à la primaire républicaine, un ouvrier mexico-canadien a eu la bonne idée d'accrocher à son sommet le drapeau mexicain, cette semaine. Diego Saul Reyna s'est expliqué sur Facebook et a ensuite précisé au Huffington Post : «J'ai vu toutes les races et toutes les religions qui travaillent dans ce bâtiment. Ils me disent leur colère et leur douleur, mais ne peuvent rien faire. C'est donc pour eux et parce que je ne travaille pas là que j'ai mis ce drapeau.» Un «message d'amour et d'unité», a insisté Diego Saul Reyna, mais aussi de crainte : «Au Canada, nous sommes très bien intégrés sur le plan ethnique et je pense qu'à force de nous décrire comme une menace pour la société, cette vision peut se répandre.»
A lire aussi : notre blog «Carnets de campagne américaine» Au secours, ma belle-mère vote Trump
L’Etat
Wyoming is coming…
Prévue le mardi 19 avril, la primaire de l’Etat de New York occupe toutes les têtes, que ce soit dans le camp républicain ou chez les démocrates. Pourtant, ces derniers votent d’abord ce samedi 9 dans le Wyoming, Etat des Rocheuses… un peu moins crucial, ce qui explique le relatif désintérêt qu’il suscite : il n’y a que 14 délégués nationaux en jeu là-bas, contre 247 dans l’Etat de New York ! D’ailleurs, aucun sondage n’y a été mené jusqu’ici. Mais l’Etat étant très majoritairement blanc (90%), il y a de fortes chances qu’il privilégie Bernie Sanders, qui a d’ailleurs déjà gagné dans les Etats voisins du Colorado, de l’Utah, de l’Idaho et du Nebraska, à la démographie comparable.
Et pendant ce temps-là, Obama…
Grosse semaine pour le président américain. Après s'être moqué du retard de François Hollande sur la «photo de famille» des chefs d'Etats à l'issue du sommet sur la sécurité nucléaire, il a dû, comme beaucoup d'autres, réagir aux «Panama papers». «La question de l'évasion fiscale est un énorme problème», «un problème mondial», a estimé Obama, avant de se montrer offensif : «L'un des grands problèmes que nous avons est que nombre de ces opérations sont légales, pas illégales. Nous ne devrions pas permettre que le fait de ne pas payer des impôts soit légal.» Pour lui, trop de lois «permettent aux gens ayant assez d'avocats et de comptables d'échapper aux responsabilités auxquelles les citoyens ordinaires doivent se soumettre». Enfin, il en a remis une couche sur la nomination d'un juge à la Cour suprême, exigeant à nouveau du Sénat qu'il prenne ses responsabilités :
The Senate has more than enough time to give Judge Garland a fair up-or-down vote. #DoYourJob pic.twitter.com/ybHNMwMWLm
— Barack Obama (@BarackObama) April 6, 2016
(To be continued…)