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Référendum

Brexit : Corbyn pour le maintien, la campagne démarre

Jeremy Corbyn est sorti de sa réserve, jeudi, pour défendre «la nécessité de rester membre de l'Union européenne» à la veille de l'ouverture de la campagne officielle du référendum, qui se tiendra le 23 juin.
publié le 14 avril 2016 à 18h12
(mis à jour le 15 avril 2016 à 7h46)

Il est enfin sorti du bois. Après des mois d’atermoiements et de déclarations maladroites, le dirigeant du Labour, Jeremy Corbyn, l’a dit haut et fort : il soutient le maintien du Royaume-Uni au sein de l’Union européenne et votera en ce sens le 23 juin, jour du référendum sur la question.

Il était temps, alors que la campagne électorale officielle pour le référendum démarre ce vendredi. D’aucuns auraient pu s’y méprendre, tant les médias sont saturés depuis des semaines (déjà) de discussions, débats et autres disputes sur les bienfaits ou non d’un Brexit (contraction de «Britain» et «exit») ou d’un Bremain (contraction de «Britain» et «remain», «rester»). Dans soixante-huit jours exactement, les électeurs du Royaume-Uni prendront une décision qui engagera leur avenir d’une manière décisive.

Retrouvez notre dossier : Brexit or not Brexit ?

Les pressions multiples des caciques du Parti travailliste auront finalement porté leurs fruits. Ce qui n'était pas gagné. Après tout, Jeremy Corbyn n'a jamais caché son euroscepticisme, avait voté contre l'entrée du Royaume-Uni au sein de l'Union européenne (à l'époque la CEE) lors du précédent référendum de 1975 et contre le Traité de Lisbonne en 2008. D'ailleurs, jeudi, dans son discours, il ne s'est pas privé de critiquer l'UE et d'appeler à des réformes pressantes. «L'Europe doit changer. Mais ce changement ne peut intervenir qu'en travaillant avec nos alliés au sein de l'Union européenne. Il est parfaitement possible d'être critique et en même temps de rester convaincu de la nécessité de rester membre de l'Union européenne», a-t-il déclaré, jeudi à Londres, devant une assemblée choisie de supporteurs travaillistes.

«Rien de ce que je fais n’est tiède»

Interrogé sur le fait que son soutien en faveur de l'UE était peut-être un peu «tiède», Corbyn a répondu, sous des applaudissements nourris : «Rien de ce que je fais n'est tiède.»

Les troupes travaillistes, dont l’énorme majorité soutient le maintien du Royaume-Uni au sein de l’UE, ont réussi à le convaincre. Un engagement plus positif de sa part pourrait avoir un impact non négligeable sur les électeurs, notamment auprès des jeunes séduits par sa personnalité. Parce que la différence le 23 juin se fera sans doute sur le taux de participation.

Les plus âgés, souvent au-delà de 60 ans, sont à la fois les plus eurosceptiques et aussi les plus enclins à se déplacer aux urnes. Et c’est exactement l’inverse avec les jeunes. Or, les derniers sondages donnent les deux camps au coude à coude, avec parfois même un léger avantage pour celui en faveur du Brexit et une marge encore relativement importante d’indécis. A ce jour, nul – et surtout pas les sondeurs qui se sont totalement trompés lors des élections générales en mai dernier – ne se risque au moindre pronostic sur le résultat en juin.

Intérêts carriéristes

Les deux camps sont désormais bien établis. D’un côté, le camp du «remain» mené par le Premier ministre conservateur, David Cameron, mais pas par la totalité de son parti, ce qui complique un peu la situation. Outre le Parti travailliste, également en faveur du maintien, les Verts, le parti libéral-démocrate et les principaux syndicats et organisations patronales soutiennent également le statu quo.

Côté Brexit, le ministre de la Justice, Michael Gove, et l'ancien ministre aux Affaires sociales Iain Duncan-Smith, sont les têtes de proue de la campagne. Le maire de Londres, Boris Johnson, les a récemment rejoints, même si son choix paraît plus dicté par des intérêts carriéristes et politiques personnels que par une véritable conviction anti-européenne. Boris Johnson, qui quittera son poste de maire le 5 mai, ne cache pas ses ambitions de succéder à David Cameron. Le dirigeant du parti anti-européen Ukip, Nigel Farage, ajoute sa voix au concert des critiques sur les méfaits supposés de l'Union européenne.

Jusqu’à la semaine dernière, le camp du «remain» restait relativement confiant. En s’appuyant notamment sur l’exemple du référendum sur l’indépendance de l’Ecosse en septembre 2014. Si le camp du «oui» à l’indépendance menait dans les sondages jusqu’à la veille du scrutin, les électeurs écossais avaient décidé au dernier moment de ne pas plonger dans l’inconnu et de choisir le modèle «connu», le Royaume-Uni.

C'était avant les Panama Papers et les révélations concernant les actions d'un fonds offshore – monté par son père – que David Cameron avait détenues. Sa popularité et sa crédibilité ont sans aucun doute souffert. Mais pas démesurément non plus, tant il a repris la main rapidement en démontrant d'une part n'avoir pas agi illégalement (il a revendu les actions héritées avant de devenir Premier ministre et a payé des impôts dessus) et en s'engageant à plus de transparence sur ses revenus. Il a ainsi publié sa fiche d'impôts, suivi par son ministre des Finances, et par Jeremy Corbyn. Il reste encore deux longs mois avant le référendum et rien, mais alors rien, n'est joué.